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  • mercredi, juillet 24, 2019

    2001, A SPACE ODYSSEY (STANLEY KUBRICK)

    Géantissime !
    J'ai revu ce chef d'œuvre absolu que représente 2001, l'Odyssée de l'Espace (1968), et bien que cela soit au bas mot la dixième fois, l'émotion de la première vision s'avère toujours intacte, et l'on ne ressort jamais complètement indemne de ce film d'une beauté hallucinante du premier jusqu'au dernier plan, qui plus qu'un film, d'ailleurs, est en réalité une expérience, de même que lorsque l'on découvre pour la première fois une symphonie de Brahms ou de Bruckner...
    On ne peut mieux dire que le maître lui-même, qui adorait d'ailleurs la musique classique à un point inimaginable : "J'ai essayé de créer une sorte d'expérience visuelle, qui contourne l'entendement et ses constructions verbales, pour pénétrer directement l'inconscient avec son contenu émotionnel et philosophique. J'ai voulu que le film soit une expérience intensément subjective qui atteigne le spectateur à un niveau profond de conscience, juste comme la musique ; "expliquer" une Symphonie de Beethoven, ce serait l'émasculer en érigeant une barrière artificielle entre la conception et l'appréciation. Vous êtes libre de spéculer à votre gré sur la signification philosophique et allégorique du film, mais je ne veux pas établir une carte routière verbale pour 2001 que tout spectateur se sentirait obligé de suivre sous peine de passer à côté de l'essentiel" !
    On y retrouve bien sûr le perfectionnisme du maître dans les moindres détails, que certains taxent de maniaquerie. Un exemple au hasard, ce plan parfait de la panthère, que Kubrick a certainement dû tourner un nombre incalculable de fois, jusqu'à ce que les yeux reflètent au moment précis "M" la lumière du soleil dans l'axe de la caméra :
    Le fameux monolithe, qui a fait couler tant d'encre... Est-ce Dieu ? Ou non ? Ou peut-être un peu ? (Kubrick lui-même n'a d'ailleurs jamais souhaité souhaiter donner d'interprétation très claire à ce sujet, et on peut supposer qu'il préférait lui aussi laisser la porte ouverte à une multitude d'interprétations) :
    Quoi qu'il en soit, c'est bien suite à l'apparition du fameux monolithe que les singes découvrent l'art d'utiliser un objet - pas anodin, du reste, l'os - pour un autre usage que sa destination initiale. Encore un exemple de la maniaquerie de Kubrick : en accompagnant cette scène extraordinaire par le non moins extraordinaire Also Sprach Zarathoustra de Richard Strauss, il s'est débrouillé pour que le moment crucial de cette découverte révolutionnaire coïncide avec la première modulation en fa majeur du thème, en décuplant pour ainsi dire l'effet sur le spectateur :
    Et bien évidemment, surtout à l'échelle de l'univers, il n'y a qu'un pas pour passer du silex à l'internet, comme le démontre Kubrick par le raccourci sans doute le plus célèbre (et le plus génial, il faut bien l'admettre) de toute l'histoire du cinéma : lancé vers l'espace, l'os amorçant sa descente se transforme subitement en un vaisseau spatial de même taille apparente sur l'écran :
    L'une des choses les plus hallucinantes, dans ce film qui a tout de même plus de cinquante ans (1968), c'est qu'absolument rien n'a vieilli, qu'il s'agisse de la conception des vaisseaux, des voyages dans l'espace et même, plus rare, des ordinateurs (pour tout dire, même celui d'un de mes films préférés, Alien (1979), "Mother" fait carrément rigoler à côté, avec ses petites lumières qui clignotent dans tous les sens).
    À noter pour la petite histoire : cet ordinateur (si dangereux qu'il est même capable de lire sur les lèvres !) se prénomme HAL, lettres qui correspondent étrangement à un géant de l'informatique si on les déplace d'un cran dans l'ordre de l'alphabet :
    Même les effets spéciaux de la phase visuellement la plus bluffante du film (l'arrivée sur Jupiter) n'ont pas vieilli d'un iota, alors qu'ils reposent presque uniquement sur des trucages à base de flaques d'huiles, de solarisations, et surtout d'un montage extrêmement rusé et nerveux... Voilà, c'est le génie à l'état pur, il n'y a pas de mot pour décrire cette séquence magique, dont l'impact est tel que l'on a encore les yeux qui clignotent en sortant du cinéma, alors qu'elle ne représente que cinq minutes de ce film de deux heures vingt :
    Pour conclure avec les deux scènes les plus déroutantes du film, celles qui ont découragé dès le départ même les spectateurs les plus assidus, les scènes au-delà de l'univers, et qui donc, selon une logique Einsteinienne, n'obéissent plus aux mêmes lois temporelles. Voici pourquoi le cosmonaute se voit, dans le même instant, adulte, vieillard, puis fœtus, le fameux fœtus astral. On peut même voir ces ultimes scènes comme une Cène à proprement parler, avec toute la symbolique implicite des plans montrant longuement le verre qui se brise, alors que le vin demeure (le contenant - le corps - disparaît, alors que le contenu - l'esprit - demeure à jamais). On rejoint ici des thèmes rarement abordés au cinéma, et pour cause : l'absence de temporalité, les univers parallèles et coexistant, l'analogie de structures entre l'infiniment petit et l'infiniment grand :
    Kubrick reconnaissait par ailleurs que la plupart des cinéastes se souciaient très peu de la forme, en n'essayant presque jamais de sortir de la structure narrative habituelle. Et il est vrai qu'à part Cronenberg, Lynch et Tarantino, bien rares sont les exemples de tentatives novatrices en ce domaine...
    Dernier exemple de cette modernité : le film débute par trois minutes d'écran noir, seulement accompagnées par le Requiem de Ligeti, phénomène qui se reproduit par la suite exactement à l'identique à 1h24', on imagine le flip dans un vrai cinéma ! Et le meilleur critère de cette modernité, c'est que ces six minutes sont toujours systématiquement coupées lors des rares diffusions TV de ce film, sauf par ARTE... Un film qui fait encore peur plus de cinquante ans après sa sortie, et bien moi, je dis (comme Schumann à l'égard de Chopin) : "Chapeaux bas, messieurs. Un génie !".
    Si j'ai pu donner envie, ne serait-ce qu'à une seule personne, d'aller de toute urgence louer ou acheter ce chef d'œuvre absolu...

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    samedi, juillet 20, 2019

    CONTACT (ROBERT ZEMECKIS)

    Un film magnifique, de Robert Zemeckis !
    Auquel je fais tout spécialement mention aujourd'hui, puisqu'il y a très exactement cinquante ans, le 20 juillet 1969, se posèrent pour la première fois trois hommes à la surface de la lune, comme ceci est à voir avec First Man : Le Premier Homme sur la Lune...
    Sorti en 1997, ce film parle d'un sujet bien rare au cinéma, la divergence entre la pensée mystique et le point du vue scientifique. Ce thème apparaît peu de fois, car il se révèle presque toujours mal réalisé et mal traité, dépourvu d'effets spéciaux et tournant en rond sur ce sujet délicat, sans en offrir une bonne vision.
    Cela, je le précise, n'est absolument pas le cas ici, et nous pouvons déjà en rendre grâce aux deux acteurs jouant les rôles principaux : le Dr Eleanor Ann "Elie" Arroway (Jodie Foster), la porte-parole des scientifiques, et le révérend Palmer Joss (Matthew McConaughey), comme son nom l'indique le représentant du circuit religieux.
    Je passe rapidement sur le début - où l'on voit pourtant toute l'histoire de Elie Arroway avec son père, qui a fait d'elle ce qu'elle est actuellement -, pour en arriver d'emblée à cet échange entre les deux, où tout se trouve en réalité débattu par l'histoire du rasoir d'Ockham :
    Cet échange de paroles n'a pas l'air très important, à ce stade du film. Après tout, peu importe que les gens pensent différemment, si cela n'a pas d'effet sur leur activité principale - la recherche en astronomie d'Elie Arroway, l'édition de livre pour Palmer Joss. Mais ceci va très vite se mettre en place, notamment avec l'arrivée du Dr David Drumlin (Tom Skerrit, déjà célèbre pour ses rôles dans Alien, Dead Zone, ou Top Gun), qui va ici se révéler une personne fort peu agréable, capable de s'investir totalement dans la suppression de biens d'Elie Arroway :
    Fort heureusement, Elie Arroway se trouvera encore fournie pendant quatre années, pour une raison qu'elle comme vous ne maîtrisez absolument pas. Mais toujours est-il qu'elle se trouvera touchée par le contact radio en provenance de Véga, une planète située à 26  années-lumière, avec ce qui se révèlera être tout d'abord un bruit assez étonnant, pour finir par se transformer en vidéo plutôt explicite :
    Bref, inutile de le préciser, toute cette prise en mains par l'état lui-même, qu'il s'agisse des forces de base :
    De leur directeur Michael Kitz, pas si méchant qu'il n'en a l'air (joué par James Woods, brillant acteur de Videodrome, Cop, et Final Fantasy, pour ne citer qu'eux) :
    Ou même de leur chef en question, Bill Clinton, filmé "pour de vrai" - avec ce qui failli être un réelle sanction aux yeux de Roland Zemeckis, mais finalement, aucune plainte juridique n'a été déposée, ce qui a transformé le jugement en avertissement pour l'avenir :
    Reste encore deux personnages à mentionner, réellement importants. Tout d'abord, le fougueux cléricaliste Joseph, autrement dit, Jake Busey - fils, comme chacun le sait peut-être, de Gary Busey :
    Ensuite, le très fameux S.R. Hadden - joué par John Hurt, lui aussi présent dans Alien -, auteur non seulement des quatre années de financement à l'égard d'Elie Arroway, mais aussi décrypteur du fameux message provisoirement illisible :
    Nous en sommes rendu, dès lors, à l'une des premières phases importantes du film, qui reproduit le texte reçu, et très vite, les tendances que cela implique dans la construction d'une machine monumentale :
    Sauf que là, comme l'on s'en doutait d'ailleurs assez justement durant tout ce début, le Dr David Drumlin - Tom Skerritt - va utiliser toutes ses relations pour s'asseoir à l'unique place offerte sur le nouveau vaisseau spatial, ce qui, bien sûr, marchera :
    Enfin, faillira marcher, pour être exact... Ceci passera du reste pour l'un des meilleurs passages du film, où l'on verra le fameux Joseph devenir un kamikaze inapproprié du vaisseau spatial :
    Un passage où Robert Zemeckis fait usage d'effets spéciaux certes assez courts, pour décrire la scission de la base, mais très bien réalisés :
    Nous voici donc rendus, à peu près, à la moitié du film. Que va t-il donc se passer, par la suite ? Et bien, rien n'est arrivé à Elie Arroway, et comme le dit fort justement S.R. Hadden, qui compte désormais grandement la favoriser, "à quoi bon bâtir une base si l'on peut en construire deux" - ce qu'il a évidemment fait sur l'île d'Hokkaidô (北海道), l'un des endroits les plus spéciaux du Japon :
    Résultat : il va désormais inculquer à Elie Arroway de s'offrir le voyage toute seule - et là, on est bien obligé d'admettre que l'une des grandes forces de ce film repose en grande partie sur Jodie Foster, l'une des actrices les plus époustouflantes du monde. C'est bien sûr le cas au tout début de ce vaste voyage :
    Mais surtout lorsqu'il se transforme de lui-même en entrée dans un tunnel particulièrement déconcertant - là encore, absolument remarquable au niveau des effets spéciaux :
    
    Le plus étonnant, c'est évidemment l'arrivée d'Elie Arroway sur la planète de Véga, qui non seulement ne se passera pas vraiment de la façon prévue, mais en outre laissera plusieurs interprétations possibles, notamment les deux en cours sur la fin :
    En fait, tout se déroulera à partir de là comme une mise en images perpétuelle, axée tout d'abord sur sa pure découverte de cet étrange élément :
    Puis continuant sur sa propre rencontre avec son père, ou plutôt, disons-le, avec une chose qui tente de se faire passer pour son père pour ne pas la perturber outre mesure - soit dit en passant, le rôle du gentil père étant tenu par le fameux David Morse, qui interprète habituellement plutôt les versions du méchant :
    Vous allez me dire, parvenus à ce moment, qu'il ne reste plus qu'une seule chose à arriver : son propre retour vers la terre. Certes, votre point de vue était tout à fait justifié, mais sans doute bien inférieur à la réalité, qui se passe en une fraction de seconde :
    En fait, le point est là : d'un certain côté, une visiteuse qui a l'impression que son voyage a duré un bon bout de temps. De l'autre, tout ceux qui sont restés sur terre, et ont le sentiment malheureux que ce voyage n'a pas pu exister, vu sa brièveté impossible :
    C'est tout cela qui vaut l'inévitable procès entre Elie Arroway et Michael Kitz, où aucun d'entre eux ne va avoir raison, pour ainsi dire, puisque leur point de vue sont irrationnels et incohérents, chacun pris de leur côté :
    Reste la dernière image du film, plutôt fascinante : celle où Rachel Constantine - Angela Bassett, évidemment - cite la vraie durée du voyage, du moins celle recueillie par la caméra, et que Michael Kitz n'a plus qu'un mot dans la bouche, lui-même scotché par toute cette aventure :
    J'ai dit la dernière image du film ? Pardon, je voulais juste dire : la dernière image du procès. Car la dernière image du film, qui prend place bien des années après le procès, est tout simplement fascinante, bien connue des amateurs de haute montagne :
    En résumé : il s'agit d'un grand chef-d'œuvre, certes ayant coûté beaucoup d'argent (90 millions de dollars !), mais étant bel et bien à la hauteur du thème abordé. D'une part, on retrouve évidemment des acteurs tous fort connus, lesquels prennent place dans un scénario très bien réalisé, avec deux grands effets spéciaux - justement avec le premier beaucoup plus court que le second, mais ceci est forcément volontaire. D'autre part, l'auteur du film ne gave personne avec son propre avis sur le sujet, de même d'ailleurs que le véritable écrivain de la nouvelle, Carl Sagan, lui-même très indécis sur le thème.
    En fait, cela nous ramène à la question du rasoir d'Ockham, et je ne peux pas m'empêcher de citer Wikipédia à ce sujet : "Il est défini par Elie comme le principe selon lequel, toutes choses étant égales, il convient de choisir l'explication la plus simple. Dans la première scène, Elie provoque un peu le révérend Palmer Joss en lui demandant de lui dire quelle est l'hypothèse la plus simple : Dieu existe mais refuse de donner toute preuve de son existence, ou bien : Dieu n'existe pas; nous l'avons créé pour résoudre nos problèmes existentiels. Palmer Joss ne sait que répondre mais fait remarquer à Elie que la notion de preuve ne peut être absolue, qu'il y a des vérités qui ne peuvent être prouvées objectivement et ne se fondent que sur notre conviction intime. Comment Elie pourrait-elle prouver, par exemple, l'amour qu'elle avait pour son père? On comprend qu'il s'agit là d'une sorte de joute intellectuelle entre une scientifique et un homme de foi. En fait, l'intérêt de la scène est de préparer l'une des scènes de la fin. Dans cette seconde scène, les rôles sont inversés : c'est à Elie qu'on demande de choisir entre deux explications : elle est réellement allée au centre de la galaxie, et a vécu toutes ces expériences extraordinaires qu'elle prétend avoir vécues, sans d'ailleurs pouvoir le prouver le moins du monde, ou bien : elle a simplement été le jouet de l'excentrique et génial financier de l'opération, le milliardaire Haden. Par honnêteté intellectuelle, Elie doit reconnaître que le rasoir d'Ockham joue contre elle et qu'il est plus simple et raisonnable de croire qu'elle ait été la victime d'un canular. Mais elle ajoute finalement, comme en écho à la réponse de Joss dans la première scène, que, si elle n'a pas de preuve, elle en a du moins l'intime conviction. Bien plus, son souhait le plus cher est maintenant de faire partager son expérience qui l'a tant transformée".
    Que dire de plus ? Certes, Jodie Foster est proprement géniale, jouant son rôle quasiment dans l'intégrale du film... Certes, les effets spéciaux sont remarquables, surtout le second, inoubliable... Certes, la musique en est tout simplement très belle, ce qui est bien normal, vu qu'elle est due, comme c'est presque toujours le cas avec Robert Zemeckis, à Alan Silvestri... Mais ceci ne remplacera absolument jamais vos commentaires, qui j'en suis sûr, seront fort adaptés et cohérents !
    Autres films du même réalisateur : Qui veut la peau de Roger Rabbit

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