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  • samedi, décembre 18, 2021

    TAXI DRIVER (MARTIN SCORSESE)

    Je sais ce que vous allez me dire d'emblée : comment Vincent, grand spécialiste de Clint Eastwood, Stanley Kubrick et Quentin Tarantino (entre autres), en est-il arrivé à traiter ainsi cette autre grand maître du cinéma, Martin Scorsese ? Je m'y suis certes un peu essayé dès le départ, avec le renversant Bringing Out the Dead, mais j'ai désormais décidé de faire beaucoup mieux, avec l'un de ses premiers films, qu'il tourna à l'âge de 34 ans (en 1976),  et qui lui valu d'emblée la Palme d'or du Festival de Cannes.

    Ce n'est sans doute pas une œuvre spécialement facile, tout d'abord en raison du scénario dû à Paul Schrader, ensuite en vertu de son âge de 45 ans, mais il est à noter que Taxi Driver fut sélectionné à partir de 1994 pour intégrer le National Film Registry, "pour son importance culturelle, historique ou esthétique".

    Attaquons d'emblée avec le personnage fondamental de l'Opus, Travis Bickle (Robert De Niro), qui bien que très jeune, avait déjà fait sensation dans plusieurs films importants, Mean Streets et Le Parrain 2. Maintenant, inutile de préciser qu'avec la Palme d'or de Cannes, prête à lui tomber dans les mains pour ce rôle, il était pour lui-même inutile de chercher ailleurs :

    Que veut-il, de prime abord ? Rien d'autre que faire le travail de chauffeur de taxi - vu que de toute façon, il s'ennuie sinon à mourir :
    C'est là que nous pouvons profiter des premières maniaqueries de Martin Scorsese, consistant en des plans très importants qui révèlent petit à petit la vie de Travis Bickle, que ceci soit filmé au plus près des détails :
    Ou bien au contraire sur une vaste vue de la route, laquelle n'est - bien entendu - pas innocente :
    En réalité, Travis Bickle n'a qu'un seul et unique objectif dans la vie : ne pas se laisser aller à sa stupide contemplation, aller automatiquement vers quelque chose de bien, de bon, de positif...
    C'est alors là où il remarque pour la première fois Betsy (Cybill Shepherd), une belle jeune fille qui lui semble incroyablement pleine de charmes, et à laquelle il ne va guère tarder à faire la cour
    Celle-ci est légèrement choquée par le comportement très généreux de ce chauffeur de taxi, mais après tout... Que lui demander d'autre, si l'on veut simplement passer un peu de temps avec un garçon si direct, et tout aussi sympathique ?
    En gros, on se met donc en attente, des deux côtés...C'est alors que monte dans le taxi, comme par hasard, le très puissant Charles Palantine (Leonard Harris), qui va très bientôt se représenter aux élections prestigieuses de New York. Dans un premier temps, Travis Bickle reste muet, par rapport aux questions plutôt délicates de cet interlocuteur :
    Mais il se rattrape fort bien dans la réponse suivante, qui résume en fait tout ce qui se passe dans son cerveau : New York, c'est une cité de merde, de la racaille, des petites gens, bref, c'est l'enfer sur terre, en résumé ! Charles Palantine fera semblant de bien l'apprécier, mais il aura vite fait de partir dès que ce sera possible, toujours protégé par ses gardes :
    Seconde entrevue, beaucoup plus romantique, avec la jolie Betsy... Mais qui va hélas très mal se finir, inutile de le dire ! Car le femme n'apprécie pas du tout que le premier film qu'on lui offre soit un porno comme les autres, qui en prime ne cadre pas du tout avec l'image que Travis Bickle lui avait laissée :
    Elle a beau l'interroger, il ne trouve aucune réponse... Comme s'il s'agissait à ses yeux d'une routine totalement normale, qu'il pratique comme tous les gens de ce pays :
    Du coup, elle a la réaction logique de toute femme face à une réaction démesurée de son interlocuteur : le quitter, et si possible, instantanément... Et en tant que responsable du bureau pour l'élection de Charles Palantine, elle s'en remet à son ami local, Tom (Albert Brooks), pour barrer l'entrée à Travis Bickle :
    C'est un peu beaucoup, n'est-ce pas ? Pour preuve les derniers mots que balance le chauffeur de taxi à sa conquête ratée, qui sont loin d'être tendres :
    Grande surprise, une fois que l'entrevue avec Betsy n'a débouché sur rien : le premier à monter dans le véhicule en question n'est autre que Martin Scorsese lui-même (oui, c'est très rare au cinéma, mais cela arrive !), un homme très classe et très riche, qui n'en a visiblement rien à foutre de l'argent :
    La seule et unique chose qu'il tient à ce que Travis Bickle voit en même temps que lui, c'est cette femme unique, à moitié déshabillée, prête à tout... Bref, sa propre femme, qu'il soupçonne déjà depuis quelque temps, et qu'il a immédiatement décidé de flinguer : 
    Résultat de tout ce début assez éprouvant : le fait que désormais, Travis Bickle ne pense plus qu'à deux choses, d'ailleurs très liées... Primo, rétablir une hygiène de vie qui soit la plus normale possible :
    Secundo, apprendre à bien manier le - pardon, les - revolvers, ce qu'il va faire tout d'abord dans le cinéma auquel il est habitué :
    Puis va très vite apprendre à le transformer en geste symbolique associé aux paroles adéquates, une fois qu'il s'est procuré les nombreuses armes souhaitées, ce qui restera définitivement un mythe au cinéma :
    Meilleure preuve, on trouve ce geste tel quel non seulement dans des productions américaines, tel Le Roi lion, Retour vers le futur 3 de Roland Zemeckis, mais aussi dans un film français bien connu, La Haine, de Mathieu Kassovitz :
    On l'a même retrouvé dans la célèbre série X-Files (saison 4, épisode N°20), où un faux Fox Mulder (David Duchovny) est en train de tenter d'imiter ce fameux geste de Robert De Niro, pour se donner l'air du vrai Fox Mulder :
    Regardez ce très court extrait (1'20"), et vous reconnaîtrez tout de suite, j'en suis sûr :
    Nous cumulons ainsi les nombreux empêchements du début : le refus de la fille, le discours aléatoire de Charles Palantine, les enseignements visuels apportés par Martin Scorsese lui-même, et enfin, son entrainement intensif au maniement d'armes... Le pire reste encore à venir, tout d'abord avec Mario (Victor Argo), le tenancier d'une simple boutique de fastfoods :
    Lequel se ferait tout simplement dévaliser, si Travis Bickle n'était pas dans le coin... Mais bon, l'essentiel est atteint, et mieux vaut le sortir très discrètement, si l'on ne veut pas des habituels ennuis :
    Ensuite, cela arrive d'une façon plutôt inattendue à l'entrée d'une boîte de prostitution, dont "Sport" Matthew (Harvey Keitel) est le garant essentiel - non dépourvu d'humour, d'ailleurs :
    Cela a l'air a priori innocent, mais ce ne l'est pas du tout... En fait, Travis Bickle cherche avant tout à retirer du réseau cette très jeune fille, Iris Steensma (Jodie Foster) - qui, cela soit dit sans rire, n'avait que 12 ans à l'époque :
    Au départ, certes, ce n'est pas une grande réussite... Bien qu'il utilise les paroles qu'il faut au bon moment :
    Mais ceci s'améliore peu à peu, lorsque celle-ci décide de prendre le petit déjeuner avec lui, et lui livre comme par hasard quelques détails sur ses conditions de défoncée :
    Sans même parler de sa vie de famille, tout simplement inexistante :
    Que reste-t-il à faire, pour Travis Bickle ? Au départ, il a l'intention de s'en prendre au futur maire de New York, tellement le discours de ce dernier lui semble trafiqué à l'avance :
    Il s'est d'ailleurs configuré pour cet acte une coupe de cheveux bien particulière, qui d'une façon générale est utilisée par tous les opposants au régime... Mais il s'était vu un peu trop important, et il va bientôt fuir à toute vitesse les agents secrets consacrés à cette affaire, s'en allant de très peu pour qu'il soit immédiatement arrêté :
    Résultat ? Il va faire la seule et unique chose qui lui semble importante : redonner sa liberté et sa vie de famille à Iris Steensma, le très jeune prostituée dont il tient beaucoup à revoir l'ascension... Raison pour laquelle il est naturellement obligé de tuer tout d'abord "Sport" Matthew, le gardien de toutes les portes :
    Puis ensuite tous ceux qu'il a l'occasion de coincer dans ce minuscule escalier, et qui sont forcément rattaché au groupe, plutôt nombreux :
    A la fin, il ne reste plus qu'à Travis Bickle à entendre la voix à peine montante de Iris Steensma... Mais hélas, pas spécialement à la respecter :
    Ce plan, qui resta l'un des plus difficiles du film à tourner, en raison de l'étroitesse des lieux et de son mauvais éclairage, est sans conteste l'un des plus marquants, tellement il diffère grandement du début - ne serait-ce que par sa grande lucidité sur qui il est réellement, et surtout sur ce qu'il lui reste à faire pour en terminer définitivement :
    Fort heureusement - attention, nous sommes dans un cinéma ! -, ceci ne va pas du tout se passer comme prévu... Certes, notre Travis Bickle fait un peu de prison, obligé ; mais il reçoit assez vite une lettre éloquente des parents de Iris Steensma, qui le remercient très longuement pour le retour de leur pauvre fille, s'excusent de ne pas pouvoir - financièrement parlant - passer à New York, mais invitent Travis à se rendre dès que possible chez eux :   
    Dernier plan du film, assez éloquent : celui où, une fois sorti de prison, il retombe comme par hasard sur la toute première femme qu'il avait vue, Betsy... Et qui, comme tout un chacun, trace une relation immédiate entre l'acte de Travis Bickle et son héroïsme :
    Chose qui lui importe peu, pour ne pas en dire plus :
    En tous cas, c'est ainsi dans l'œuvre de Martin Scorsese, et si vous ne l'avez pas encore vu (très improbable, en 2021, soit 45 ans après), je vous livre un ultime spoiler :
    C'est en soi une pièce assez flagrante, non seulement pour Scorsese en personne, dont elle représente tout à la fois la lutte pour le droit et le combat pour l'identité, également pour Jodie Foster, dont il s'agit quasiment du premier film à l'âge de 12 ans (avant une très longue et riche carrière), mais aussi, hélas, pour Bernard Herrmann, qui fut le musicien favori de Alfred Hitchcock durant sa grande période (1955-1966), et se retrancha un temps à Londres, avant de signer sa dernière œuvre à l'occasion de Taxi Driver.
    Ainsi, ce film définit au mieux ce qu'il est : une traversée de cette période difficile, parfois nommée "vie", qui commence de façon virtuose avec Jodie Foster, se poursuit avec la fabuleuse prestation de Robert De Niro, puis finit de façon tragique avec Bernard Herrmann, qui décéda le soir même du dernier jour d'enregistrement. Raison pour laquelle lui est ainsi dédié Taxi Driver à sa dernière image, que j'espère vous verrez toujours près de 45 ans plus tard - ce que personnellement, je n'ai aucun complexe à assumer pleinement. Bienvenue pour un commentaire !
    Autres films du même réalisateur : Raging BullAfter HoursCape FearBringing Out the DeadAviator, Hugo CabretSilence

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    6 Comments:

    Anonymous Anonyme said...

    pas vu encore,peut être un jour.

    samedi, 18 décembre, 2021  
    Blogger Vincent said...

    Comment ça, tu n'as pas vu ce film ? Je rêve, là... C'est l'un des meilleurs de Martin Scorsese, et ça te reste donc à découvrir, si j'ai bien compris... Hallucinant !

    samedi, 18 décembre, 2021  
    Anonymous DELESALLE said...

    COUCOU OUI JE VOUS AI EMBOITé LE PAS pour Taxi Driver Je suis toujours ahurie de voir le travail effectué par vous pour nous présenter ce film assez dur à digérer pour moi. Un thème morbide à souhait avec l'imterprètation d'un de Niro de plus en plus angoissante que vous arrivez bien à faire ressentir...mais à la veille de Noël, je n'ai peut-être pas vraiment choisi le thème le plus adéquate pour me "divertir" ...voici en tas un commentaire que j'ai le mérite d'écrire à minuit pour vous montrer que je m'intéresse à votre incroyable travail 'analyse Bravo!!!

    vendredi, 24 décembre, 2021  
    Blogger Vincent said...

    Merci beaucoup, pour votre engagement à minuit du jour de Noël ! Il est vrai que ce film est un peu dur pour cette fête, raison pour laquelle j'y ai substitué AFTER HOURS, à la dernière minute... Mais Scorsese est toujours là, et il nous conclut TAXI DRIVER avec l'air désinvolte de Robert De Niro conduisant "par hasard" la femme qu'il avait aimé autrefois, sans s'en montrer plus ému que ça ! La grande classe, quoi...

    samedi, 25 décembre, 2021  
    Anonymous Jean-Paul Desverchère said...

    Dans un premier temps, il s'agit de se divertir de nuit en chargeant par ci par la toute une brochette locale et débauchée ne sortant que la nuit sur un site marginalisé dominé par la violence et la perversion.
    Sodome et Gomorrhe du crépuscule à l’aurore muni de tous les composants nécessaires à saper la raison déjà bien entamée d’un insomniaque ne supportant plus le débordement de tout ces comportements décalés.
    L’archivage du seuil de tolérance d'un dragueur un peu lourd dans une symphonie sanguinaire et punitive sanctionnant le microcosme d’une mégapole apocalyptique nettoyée par un justicier devenu sans contrôle.

    jeudi, 26 mai, 2022  
    Blogger Vincent said...

    Désolé, mais je ne sais pas quoi répondre, à un commentaire aussi engagé... Par avance, veuillez m'excuser !

    dimanche, 29 mai, 2022  

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