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  • vendredi, mars 08, 2024

    JOURNEE INTERNATIONALE DES FEMMES (2024)

    Je vous l'avais promis, je suis à nouveau ici afin de célébrer cette cérémonie créée en 2010 - qui rend hommage aux réalisatrices les plus douées du monde, et dont je vous avais déjà parlé l'an dernier sur ce premier article.

    Bien sûr, il y a toujours les mêmes, à commencer par la plus ancienne Kathryn Bigelow - qui fut la première à remporter en 2010 le prix de la BAFTA pour The Hurt Locker (Démineurs) -, pour conclure avec la géniale Jane Campion, Palme d'or du Festival de Cannes en 1993, grâce à The Piano.

    Sans oublier Andrea Arnold, Sofia Coppola, Mary Harron, Julie Taymor et d'autres, qui se sont également rendues célèbres avec leurs Opus inoubliables - mais dont j'ai déjà parlé dans l'article de 2023... En revanche, il y a cette année deux nouvelles cinéastes, que je vais m'empresser de vous décrire.

    1) Leyla Bouzid est la plus jeune, née en 1984 en Tunisie :

    Son premier film de 2015, A peine j'ouvre les yeux, a au bas mot remporté sept prix, notamment à la Mostra de Venise :
    On y découvre tout au long la formidable actrice Baya Medhaffar, qui en plus est une excellente chanteuse, et interprète constamment les chansons du groupe - normalement sous-titrées.
    L'action se passe à Tunis au cours de la présidence de Ben Ali (terminée en 2011 de sa propre volonté), et nous voyons bien comment la façon de chanter de cette jeune fille se dégrade de plus en plus, ainsi que sa relation avec sa mère - au début fort négative envers la passion pour la musique de sa fille, qu'elle souhaite voir devenir médecin : 
    Je vous en fait découvrir un petit extrait :
    Et même le propre point de vue de Baya Medhaffar, très édifiant :
    2) La seconde, Kaouther Ben Hania, est née en 1977 en Tunisie :
    Son premier film de 2017 - au-delà d'un simple documentaire - s'intitule La Belle et la Meute, et raconte l'histoire vraie issue de l'ouvrage Coupable d'avoir été violée de Meriem Ben Mohamed :
    Cela décrit en neuf plans-séquence le destin d'une jeune fille de 21 ans, qui se fait violer par deux policiers - et ne trouve la solution qu'à la toute fin... C'est un Opus assez éprouvant, je ne vous le cache pas, mais c'est magistralement joué par Mariam Al Ferjani :
    Voici un petit trailer :
    Et de nouveau une explication plus raffinée sur TV5 :
    3) J'en reviens maintenant à la fameuse Haifaa al-Mansour, née en 1974 en Arabie saoudite, et qui s'est depuis installée aux Etats-Unis, à Los Angeles :
    Bien qu'elle ait depuis produit au moins trois films (dont le prestigieux Mary Shelley en 2017), elle reste toujours célèbre grâce à celui-ci, qu'elle tourna en 2012 dans la capitale de l'Arabie saoudite, Riyad :
    C'est le fameux Wadjda sorti en 2013, et qui raconte l'histoire de cette jeune fille de 12 ans... Elle vit dans un milieu très conservateur, mais elle écoute du rock, porte un jean, met des Converse, et surtout, rêve d'acquérir un vélo - qui se trouve hélas interdit aux femmes !
    Elle s'inscrit donc au concours de récitations coraniques, et finit par le gagner - ce qui lui permet enfin de faire la course à vélo, depuis longtemps attendue avec son ami Abdallah :
    Vous le connaissez déjà bien, n'est-ce pas ?
    Si ce n'est pas le cas, vous en trouverez une description bien mieux faite sur mon site, à l'adresse suivante : Wadjda
    4) Ibidem avec la réalisatrice franco-turque Deniz Gamze Ergüven, née en 1978, et qui n'a hélas depuis tourné qu'un seul film aux Etats-Unis en 2017, Kings :
    Son grand succès reste bien sûr le célèbre Mustang, tourné en Turquie en 2015 :
    Cela raconte l'histoire délirante de cinq jeunes filles orphelines, qui vivent chez leur grand-mère au nord d'Istanbul, et se trouvent progressivement confrontés de plus en plus au patriarcat de leur oncle Erol...
    Leur maison devient peu à peu inaccessible, pourvue de barreaux, de portes fermées à clef, et du même coup plus d'école, d'ordinateur ou de téléphone. Les cinq finissent par se révolter avec puissance, mais hélas pas toujours avec succès - l'une d'entre elles préférant même se suicider. Seul deux jeunes filles parviennent au bout - dont la benjamine Lale -, et quittent cette fois définitivement leur pays :
    Soyez rassurés, cela ne fut pas le cas en réalité, où pour finir, voici une photo avec la réalisatrice - après le film, bien sûr :

    Mais ceci ne nous empêche pas de revoir un fameux trailer :

    Ou encore de consulter l'article sur mon site : Mustang

    Désormais, je souhaiterais vous parler des deux nouvelles cinéastes qui ont décroché la Palme d'or du Festival de Cannes : tout d'abord, Julia Ducournau en 2021 pour son film Titane, suivie par Justine Triet en 2023, avec son Opus Anatomie d'une chute. Mais pour différentes raisons, je n'ai malheureusement pas encore vu ces deux films, et suis donc à une mauvaise place pour les servir...

    En revanche, je ne pourrais pas m'empêcher de citer une nouvelle fois les deux femmes impliquées dans cette fonction puissante, en commençant évidemment par celle que tout le monde attend :

    5) Jane Campion (née en 1954), réalisatrice de Nouvelle-Zélande, qui s'est révélée grâce à huit films - dont bien sûr The Piano (1993), qui fut le tout premier à obtenir la Palme d'or du Festival de Cannes :

    Mais elle a depuis beaucoup tourné (entre autres The Portait of a Lady (1996) et Holy Smoke (1999)), dont ce dernier visiblement très bon, The Power of the Dog (2021), et qui remporta nombre de prix internationaux - notamment la Mostra de Venise et la BAFTA :

    6) Et de toute évidence Kathryn Bigelow (née en 1951), cinéaste américaine autrefois mariée à James Cameron, et qui obtint en 2010 le premier prix de la BAFTA pour son étonnant The Hurt Locker (2009), qui marque le rôle ambigu durant la guerre d'Irak de l'équipe américaine de déminage :

    Néanmoins, ce fut très loin d'être son dernier Opus, puisqu'à la suite de Point Break (1991) et de Zero Dark Thirty (2012), elle remet la main à un drame historique survenu en 1967 à Detroit (2017) :

    Voila, je préfère en finir là, en évitant de citer le nom de certaines réalisatrices qui ne me semblent pas tout à fait à leur place - et ceci est absolument identique chez les hommes, soyez-en sûr...

    Ah, j'allais oublier une chose : nous devenons depuis le 4 mars le premier pays du monde à inscrire dans la constitution et à autoriser le droit à l'IVG (Interruption Volontaire de Grossesse)... Sachant que 40% des femmes vivent dans des pays qui restreignent ou interdisent l'accession à l'avortement, en l'occurrence l'Afrique et une partie de l'Amérique du Sud, ce n'est plutôt pas mal, non ?

    Si vous souhaitez laisser un commentaire sur cet article - et surtout en leur faveur -, très volontiers !

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    mardi, avril 25, 2023

    THE PIANO (JANE CAMPION)

    Savez-vous pourquoi je me mets à parler de ce film (tristement intitulé en français La Leçon de piano), datant exactement de 1993, soit trente ans auparavant ? Il y a au moins deux bonnes raisons à cela, et je vais vous les donner sans plus tarder :

    1) Il s'agit du premier film réalisé par une femme à remporter la Palme d'or du Festival de Cannes cette même année, Jane Campion, une artiste de Nouvelle-Zélande fort douée pour parler de son propre pays. Ensuite, il y a hélas assez peu d'évènements de ce type, exception faite de la nomination de Kathryn Bigelow à obtenir le premier prix de la BAFTA en 2010, dont j'ai naturellement déjà parlée dans mon article du 8 mars, Journée internationale des femmes.

    2) Par ailleurs, il y a extrêmement peu d'Opus concernant cet instrument - dont j'ai joué presque toute ma vie... Je pourrais certes parler d'Amadeus de Milos Forman (1984), ou de The Pianist de Roman Polanski (2002), mais il ne joue qu'un rôle totalement secondaire dans ces films, alors qu'il est fondamental dans celui de Jane Campion - d'autant que l'actrice principale l'utilise comme moyen de communiquer, étant muette depuis l'âge de six ans.

    Ada McGrath (Holly Hunter) est en effet une grande interprète, et on l'entrevoit au tout début venant de son Ecosse natale en 1852. Juste avant de débarquer avec sa petite fille dans l'île de Nouvelle-Zélande, une nommée Flora McGrath (Anna Paquin), où celle-ci lui sert de traductrice de sa langue des signes :

    Entièrement vêtue d'habits typiques de l'époque victorienne, elle est au départ prise en charge par la troupe de Maoris - qui, pour l'instant, s'avère plutôt pacifique :
    Très peu de temps après, elle va rencontrer en même temps l'énigmatique George Baines (Harvey Keitel), et celui pour lequel elle est venue spécialement en Nouvelle-Zélande, le futur mari qu'elle ne connait pas encore, Alistair Stewart (Sam Neill) :
    Mais il va faire aussitôt ce qu'il faut, le mariage, même si cela se passe rapidement et entièrement sous la pluie :
    Ce qui provoque, on ne sait trop pourquoi, cet aveu insoupçonné de George Baines à Ada McGrath :
    Mais elle, bien que muette, n'est pas sourde du tout, et veut absolument son piano - qui est resté sur la plage, en fonction du peu d'intérêt qu'éprouve Alistair Stewart envers cet instrument :
    Bien qu'Ada McGrath l'ignore encore, George Baines est le seul à pouvoir l'aider... Il a très bien senti la désapprobation d'Alistair Stewart envers cet instrument, et tente de lui échanger contre des terres visiblement inutiles, mais dont le colon serait bien avide :
    Alistair Stewart a l'air dans un premier temps assez surpris, mais il adopte rapidement cet échange, qui rapporte finalement à tout le monde :
    C'est donc le moment pour Ada McGrath et sa petite fille d'aller jouer une dernière fois sur la plage, avant que le piano ne déménage définitivement chez George Baines... N'oublions d'ailleurs pas que toute la musique du film, très généreuse et bien parlante, est due à Michael Nyman, qui nous donna à l'occasion son Concerto pour piano !
    Une fois le piano dans la maison du principal intéressé, il n'y a qu'une seule façon de le racheter - et ce n'est certes pas sur le peu d'argent d'Alistair Stewart qu'elle doit compter... En fait, George Baines monte un deal avec elle, consistant à échanger un certain nombre de touches contre ce qu'elle pourra donner d'elle-même, à prendre ou à laisser :
    Sa petite fille Flora s'inquiète un peu, dans un premier temps :
    Mais visiblement, pour de rien... Comme le fait remarquer à Alistair Stewart sa tante Morag (Kerry Walker), tout se passe provisoirement bien :
    George Baines commence donc à appliquer son deal, dans un premier temps plutôt simple et facile à réaliser :
    Au bout d'une heure de film, on assiste à une grande fête montée pour la famille dans la maison d'Alistair Stewart... Où se matérialisent pas mal de choses, absolument pas dues au hasard - si l'on sait bien lire au second degré :
    Pendant ce temps, George Baines exige de plus en plus d'Ada McGrath... Et si celle-ci fut un peu gênée au départ, elle sait maintenant exactement quoi lui demander, et n'hésite pas à lui donner son prix :
    Alors survient un coup de théâtre assez inattendu : n'ayant au bout du compte pas assez d'argent pour acheter le piano, il décide finalement de le rendre à Alistair Stewart, en compagnie des Maoris pour le porter :
    Cela provoque chez Ada McGrath une réaction marquée, tout à la fois très violente et portée sur le silence absolu, ce qui gêne beaucoup Alistair Stewart :
    Et George Baines le vit très mal lui aussi, bien que pour une toute autre raison :
    Le problème, c'est qu'Ada McGrath est finalement assez d'accord avec lui, pouvant de moins en moins supporter ce mari colon Alistair Stewart, qu'elle a depuis longtemps mis de coté :
    Hélas, Alistair Stewart passait justement par là, et se livre à l'espionnage de leurs pratiques - qui lui semblent insultantes et totalement dépravées :
    Peu de temps après, il tente la même chose dans les bois avec Ada McGrath, mais sans succès... Car fort heureusement, la petite fille Flora intervient au bon moment :
    Cela n'empêche pas Alistair Stewart de se montrer extrêmement virulent, allant jusqu'à les séquestrer toutes les deux dans une maison entièrement bouclée... D'où elle est interdite de sortie, jusqu'à ce qu'il lui dise la vérité sur George Baines et son départ :
    Et s'interroge du même coup sur cet autre fait, bien plus gênant pour lui, et totalement incompréhensible :
    En ce moment, enfermée dans la maison, elle n'a qu'un seul moyen de communiquer avec George Baines en écrivant son amour sur une touche de piano, qu'elle lui fera parvenir en utilisant sa petite fille :
    Mais Alistair Stewart s'en aperçoit, par négligence de Flora... Et décide de lui couper un doigt à la hache pour commencer - même s'il doit monter jusqu'à deux, trois ou quatre par la suite :
    Ensuite, il a bel et bien l'intention de tuer George Baines avec son fusil... Mais il s'en empêche à la dernière minute, comprenant très bien qu'au final, seule la volonté de Ada McGrath compte réellement :
    Il laisse donc George Baines l'emmener avec lui sur un archipel bien plus paisible, ce qu'il fait aussitôt avec l'aide de quelques Maoris... Mais Ada McGrath va bien surprendre tout le monde par sa dernière volonté, celle de jeter le piano en pleine mer depuis la pirogue :
    Et plus étonnant encore, elle passe le cordon à ses jambes pour mourir au même endroit... Mais elle sort de l'eau finalement bien décidée à vivre, quoiqu'il arrive :
    Finalement, elle a bien raison... Une fois parvenus sur une autre terre dans leur nouvelle maison, George Baines lui refait son doigt, et Ada McGrath apprend à parler (ou se souvient de la parole ?) :
    La presque dernière image nous surprend toujours, tellement elle nous montre à quel point Ada McGrath avait raison, et ne se trompait pas du tout vis-à-vis des intentions de George Baines :
    Vous voulez voir un petit trailer de cet excellent film ? Je vous en prie :
    C'est une œuvre étonnante, n'est-ce pas ? D'une part, bien sûr, car il s'agit de la première Palme d'or du festival de Cannes remis à une femme en 1993, mais d'autre part, parce qu'il y est question - en une époque beaucoup plus réservée - du pouvoir féminin sur les hommes qui passent à ses côtés.
    Le rôle de Holly Hunter y est d'ailleurs remarquable, aussi bien en tant que pianiste qu'en tant que grande muette ne se servant que de la langue des signes, et lui valut non seulement le prix d'interprétation féminine dans ce même festival en 1993, mais aussi l'année suivante un prix identique aux Oscars, aux Golden Globes et à la BAFTA.
    Sam Neill n'apparaît par contre pas sous son meilleur aspect, surtout comparé à Harvey Keitel, qui emporte tout... Mais quoi qu'il en soit, cela reste avant tout important pour Jane Campion, qui gagna avec ce prix une vision bien plus positive de ses films précédents (surtout An Angel at My Table, assez fantastique), et lui promettant un très bel avenir - notamment avec The Portait of a Lady, avec Nicole Kidman et John Malkovich. Soyez donc très heureux en regardant cet Opus, qui a très peu d'équivalents sur le marché !

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