Un film très étonnant, réalisé par Tim Burton en 1994, et narrant la vraie vie du "plus mauvais réalisateur de tous les temps" tel qu'on le surnommait à l'époque, Edward David Ed Wood Junior (1924-1978)... Cette œuvre est l'un des biopics dont j'ai déjà parlé ici (Raging Bull (1980), Bird (1998), Frida (2002), The Last King of Scotland (2006) et Marie-Antoinette (2006)), et s'avère en ce sens plutôt incroyable, tellement la vie de cet homme était hallucinante, ne serait-ce que par ses nombreuses fonctions de réalisateur, acteur, producteur, scénariste et monteur.
Et pourtant, il a réellement existé, et contrairement à ce qu'il a l'habitude de faire, Tim Burton le décrit exactement tel qu'il était (même si cela est parfois assez humoristique), présenté tout d'abord par Criswell (Jeffrey Jones) :
Afin de le rendre encore plus crédible, Tim Burton le tourne entièrement en noir et blanc, ce qui est assez rare à l'époque (encore que cela a déjà été utilisé par Martin Scorsese pour Raging Bull (1980), et Steven Spielberg pour La Liste de Schindler treize ans plus tard). On découvre dès le début la première femme de Ed Wood, Dolores Fuller (Sarah Jessica Parker), qui semble s'entendre très bien avec lui, même si elle est contrainte de jouer dans un film particulièrement maladroit :
Ceci est nettement souligné par Bunny Breckinridge (Bill Murray, seul acteur célèbre qui avait tourné l'année précédente Groundhog Day), aux yeux de Dolores Fuller et d' Ed Wood (Johnny Depp) :
Mais l'un des évènements les plus importants se produit alors dans la vie d'Ed Wood, sa rencontre avec Béla Lugosi (Martin Landau, qui tournera 4 ans plus tard dans le film X-Files), un acteur sans doute déjà bien connu aux USA en raison de son film fétiche Dracula (1931), dû à Tod Browning :
Vient alors le producteur Georgie Weiss (Mike Starr), qui charge Ed Wood d'un nouveau film basé sur la transidentité, basé sur un projet de Christine Jorgensen.... Mais le scénario s'avère très mauvais, ce qui persuade Ed Wood et Georgie Weiss de construire un nouveau film, nommé Glen or Glenda ? On peut certes penser qu'à cette occasion, le producteur a l'air d'assez mal réagir à l'habitude occasionnelle d'Ed Wood de s'habiller en femme :
Mais bien au contraire, ceci est pour lui totalement naturel d'être de temps en temps travesti - d'autant que sa propre mère l'a initié à tout cela alors qu'il était encore petit enfant... On le voit au grand sourire qu'il aborde sans complexe dans cette scène, à l'époque fort peu répandu :
Du coup, il en profite pour donner un petit rôle à Béla Lugosi - sauf que l'action se passe en 1946, et que Béla Lugosi, né en Hongrie en 1882, a déjà 64 ans :
Toujours est-il qu'il montre bien ce qu'il sait faire, même si cela se limite grandement à ses origines hongroises et à Dracula :
Mais cela ne dissuada absolument pas Ed Wood, qui restera son ami pour toujours :
Celui-ci ne s'inquiète du reste pas du tout, étant donné que le cours de Glen or Glenda ? s'avère très bien parti - peut-être grâce à Béla Lugosi lui-même :
Hélas, ses actions sont de plus en plus souvent critiquées par sa première femme, Dolores Fuller, qui a vraiment du mal à supporter son travestissement - de même que sa mention dans le scénario, qui lui apparaît comme une véritable honte :
Sans parler des réactions de Georgie Weiss, son producteur, qui malgré les prétendues explications d'Ed Wood, disjoncte totalement, et décide de mettre fin au film, quoi qu'il arrive :
Mais l'on commence à bien connaître Ed Wood, et à pressentir que rien ne l'arrêtera jamais... Meilleure preuve avec ce nouveau film qu'il a décidé de monter en 1955, La Fiancée du monstre, et qu'il va commencer à tourner à peine après avoir rencontré Tor Johnson (George Steele), un boxeur n'ayant aucune ambition particulière pour le cinéma :
Comme par hasard, se présente également la belle Loretta King (Juliet Landau), qui va faussement persuader Ed Wood de l'engager en échange de 60000 dollars... Ce qu'il va évidemment accepter, avant de se rendre compte qu'il ne s'agit que de 300 dollars, le reste de la somme étant parti on ne sait où :
Toujours est-il qu'Ed Wood se lance malgré tout dans le projet - et ce sera d'ailleurs le seul à avoir dégagé un bénéfice de son vivant :
Ce qui semble incroyable, vu que le film a accumulé des maladresses de scénario, des acteurs pratiquement inconnus, et des images d'archives sans aucun rapport... Sans parler de cette scène hallucinante avec le faux poulpe, volé au studio de Republic, mais malheureusement sans son moteur, ce qui rendit sa réalisation assez périlleuse - mais c'est bien connu, toujours "parfaite" aux yeux d'Ed Wood :
Par contre, Dolores Fuller, qui devait jouer au départ le rôle principal, et fut hélas remplacée par Loretta King, n'en peut visiblement plus de cette trahison... Et du coup, après avoir bombardé son mari de phrases maudites et désespérantes, elle décide de le quitter définitivement :
Pour ne rien arranger, Béla Lugosi tombe subitement malade, contractant une maladie due à son usage de la morphine depuis vingt ans :
Fort heureusement, Ed Wood rencontre à ce moment-là une nouvelle femme, Kathy O'Hara (Patricia Arquette), qui non seulement ressemble étrangement à la première, Dolores Fuller, mais se révèle bien plus agréable et sympathique, tant du point de vue de son travestissement que concernant son propre métier :
Cela tombe bien, car Ed Wood doit lutter contre la colère du public lors de sa première présentation de La Fiancée du monstre, une salle dont ils ont tous du mal à partir :
Et comme si cela ne suffisait pas, il se trouve que Béla Lugosi décède peu de temps après, à l'âge de 73 ans, une mort due évidemment à l'abus de drogues durant ces longues années... Ils se rendent donc tous à sa dernière demeure, ayant l'air visiblement très tristes de cette macabre nouvelle :
Croyez-vous mieux connaître Ed Wood, désormais ? Vous avez tort, parce qu'à peine passés ces deux évènements, ce "plus mauvais réalisateur de tous les temps" se lance dans un film complètement science-fiction, Plan 9 from Outer Space (1959), auquel collaborent sa nouvelle femme Kathy O'Hara et la très difficile à convaincre Vampira (Lisa Marie), déjà fort connue pour son intervention à la télévision :
Bien sûr, il aimerait pouvoir encore disposer de Béla Lugosi... Mais comme c'est hélas impossible, il trouve vite une solution qui lui paraît parfaite, faire jouer le célèbre chiropracteur Tom Mason (Ned Bellamy) à sa place, le visage juste dissimulé vers le bas :
Il n'empêche, tout cela est bien difficile, ne serait-ce que parce qu'il a obtenu l'essentiel de l'argent du film via des responsables de l'église baptiste, qui ont des règles de morale très restrictives... Ainsi, pour une fois, Ed Wood serait sur le point de tout abandonner, lorsque très étrangement, il rencontre dans un bar le célèbre Orson Welles (Vincent D'Onofrio, déjà célèbre pour son apparition dans Full Metal Jacket en 1987), l'une de ses idoles parfaites :
Celui-ci lui dit grosso modo ce qu'il pense des producteurs, du financement ou du marché, et cela suffit pour persuader Ed Wood de reprendre son projet :
Ce qu'il fait désormais sans aucun complexe vis-à-vis des prêtres baptistes, desquels il rejette la moindre opinion, n'hésitant même plus à se présenter comme directeur entièrement travesti :
Et il sort définitivement son film Plan 9 from Outer Space en 1959, dans un grand cinéma du coin :
Vous ne refuserez pas un extrait, n'est-ce pas ?
A partir de là, Tim Burton ne nous montre plus la fin de la vie d'Ed Wood, où suite à une dépression constante, à l'insuccès de ses films et à son alcoolisme, il mourut en 1978 à seulement 54 ans... Mais il conclut avec cette phrase du réalisateur qui s'avérera parfaitement réaliste, avant de terminer son film Ed Wood par de petites biographies de tous ceux qui l'ont accompagné :
Je ne sais pas si je vous l'ai déjà dit, mais j'ai trouvé ce film excellent, comme du reste la majorité de 92% de critiques favorables. Il est certain que Tim Burton a dû procéder à de petits arrangements de dernière minute, mais dans l'ensemble, sa biographie est absolument parfaite, et pas du tout exagérée...
Voilà, j'espère que je ne vous en ai pas trop dit... En tous cas, ces biographies filmées sont quasiment toutes géniales, raison pour laquelle je les ai adorées et critiquées de cette façon, et bien sûr, je place Ed Wood (1994) parmi les meilleures, même si son choix était a priori assez étonnant !
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