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  • mardi, février 14, 2023

    SHINING (STANLEY KUBRICK)

    Que dire de ce film de Stanley Kubrick, qui se situe en 1980 entre Barry Lyndon (1975) et Eyes Wide Shut (1999) ? C'est très simple : de même que le premier est la meilleure œuvre historique jamais tournée et le second le plus bel Opus romantico-érotique, celui-ci se révèle d'emblée comme le meilleur film d'horreur (ou thriller, si l'on veut) jamais produit, encore supérieur à Rosemary's Baby (1968) ou L'Exorciste (1973).

    Tout comme ses antécédents, il intègre trois des concepts fondamentaux à ce genre : un hôtel isolé et hanté, un personnage central disposé peu à peu à tuer toute sa famille, et le fameux shining qui lui donne son nom, une sorte d'étrange télépathie qui permet d'avoir - sans paroles - une vision du passé ou de l'avenir.

    A l'origine, il s'agit d'un roman de Stephen King, daté de 1977, qu'en tant que spectateur il trouvait remarquable, mais qu'il désavouait complètement de son propre point de vue d'écrivain, déçu par la fin du personnage principal dans la glace... En tous cas, le décor s'avère le même, celui d'un vaste hôtel qu'il va falloir surveiller durant le long hiver, et ceci pratiquement seul :

    Avant même de partir en cet endroit, Jack Torrance (Jack Nicholson, déjà fort connu) se livre à un ultime entretien avec les principaux responsables du groupe... Et tout semble bien se passer, même la mention d'un certain Delbert Grady, un homme pourvu des mêmes fonctions, et qui a malheureusement tué toute sa famille bien des années auparavant :
    Mais Jack Torrance semble totalement à l'abri de cela, et donne enfin sa véritable activité d'écrivain :
    Il ne lui reste plus qu'à emmener toute sa famille vers l'hôtel Overlook du Colorado, et l'histoire peut alors commencer :
    Nous découvrons tout au début son fils, Danny Torrance (Danny Lloyd), qui est l'un des très rares à avoir le pouvoir de shining... Sauf que très jeune, il ne sait pas bien s'en servir, et se demande pourquoi les jumelles Grady (Lisa et Louise Burns) lui apparaissent brièvement :
    Le cuisinier de l'hôtel, Dick Halloran (Scatman Crothers), fait rapidement visiter tous les lieux importants, avant de se retrouver seul à seul avec Danny - auquel il parle du phénomène shining, car il le possède et le comprend bien mieux que lui :
    Danny lui pose alors la question, de savoir ce qu'il y a dans la chambre 237... Mais le cuisinier lui répond simplement par la négative, lui déconseillent fermement d'entrer dans cette pièce :
    Peu de temps après, Jack Torrance contemple le labyrinthe - sorte de jardin extérieur, si perfectionné qu'une maquette en a été reconstituée à l'intérieur de l'hôtel :
    Pendant que sa femme Wendy Torrance et son fils Danny en découvrent les mystères réellement, et se régalent provisoirement avec cette petite promenade :
    Il est inutile de noter une nouvelle fois le goût de Stanley Kubrick pour la musique classique, mais le traitement particulièrement remarquable qu'il a donné à l'œuvre de Béla Bartok (Musique pour cordes, percussion et célesta) est à regarder absolument, tellement tout est pensé au millimètre :
    Et il en va de même avec la tentation qu'a Danny de visiter la chambre 237, toujours accompagné par la même musique de Béla Bartok... Scène où il ne se passe quasiment rien, mais qui deviendra tellement mythique qu'elle sera citée par James Cameron lui-même dans Aliens en 1986 :
    Tout ceci se déroule le jour de fermeture, et selon toute apparence, Jack Torrance a l'air encore en pleine forme, en train d'écrire dans ce décor magnifique son futur roman :
    Mais cela n'empêche pas sa femme Wendy d'être un peu trop à ses côtés, ce à quoi il réagit de manière claire et directe :
    Pour ne rien arranger, Danny revoit les deux sœurs jumelles, mais sous un jour beaucoup plus inquiétant, qui laisse supposer ce qui s'est réellement passé :
    En outre, il tente de rentrer dans dans la chambre 237... Et en ressort finalement toujours vivant, mais le cou marqué de strangulation - ce qui affecte profondément sa mère Wendy, qui faute de mieux soupçonne fortement Jack Torrance :
    Lorsqu'elle tente de le retrouver, elle le découvre en fait en train de sortir à peine d'un cauchemar épouvantable... Dans lequel il se voyait en train d'assassiner sa femme et son fils, ce qui même à ses yeux, lui semble irrationnel et incroyable :
    Furieux de tout cela, il décide alors de se rendre au bar de l'hôtel, Gold Room, dont il semble curieusement déjà connaître le serveur, puisqu'il l'appelle par son prénom, Lloyd (Joe Turkel) :
    Cela n'a pas l'air de l'étonner outre mesure, mais ceci nous incite tous à nous poser la même question, au bout d'environ 40' de film : est-ce normal qu'il retrouve un barman dans un hôtel théoriquement complètement désert, ou la tête de Jack Torrance lui fait-elle déjà voir des choses qui n'existent absolument pas ?
    En tous cas, lorsqu'à la demande de Wendy, il décide de se rendre à son tour dans la chambre 237 dans l'espoir d'y découvrir quelque chose, il sera tout d'abord fasciné par cette femme tout juste sortie de la baignoire :
    Mais cette première approche va bien vite se dégrader, lorsque celle qu'il commençait à embrasser s'avère en fait être un cadavre en pure décomposition :
    De plus en plus en colère, Jack Torrance se rend alors à nouveau dans le bar Gold Room, mais cette fois-ci en pleine activité, rempli de monde, tous habillés en costumes des années 1920, et jouissant d'une musique de cette époque - ce qui est proprement incroyable, même - et surtout - pour nous autres spectateurs :
    Gêné par tout ce monde, il fini par bousculer un serveur par accident, qui s'avère en fait être le fameux Delbert Grady (Philip Stone), un ancien barman meurtrier bien des années plus tôt :
    En allant aux toilettes avec lui, il ne sait trop quoi penser... Cet homme là existe-t-il vraiment, et si c'est bien le cas, est-il vraiment coupable de ce qu'on lui reproche ? 
    En tous cas, Delbert Grady lui donne alors ses propres conseils :
    C'est le moment précis où l'on est donc définitivement fixé : Jack Torrance est bel et bien fou, la meilleure preuve en étant dans le fait qu'il détruit la radio, et sabote la seule chenillette de l'hôtel. Wendy bascule elle aussi dans le rejet total de son mari, lorsqu'elle découvre son prétendu livre, qui n'est en fait que la seule et même phrase répétée sur 500 pages, juste écrite différemment :
    Tous les deux commencent alors à s'accrocher, jusqu'à ce que Jack Torrance révèle enfin sous une forme tordue sa véritable intention - sauf qu'elle s'est armée  par prudence d'une batte de baseball :
    Elle finit par le frapper, le laisser tomber dans les vapes au travers de l'escalier, puis par l'enfermer dans la réserve alimentaire - faute de mieux :
    Ce qui n'empêche pas Jack Torrance de se réveiller, et de lui hurler au travers de la porte ce qu'il a déjà accompli - en l'occurrence, la destruction de la radio et de la chenillette
    Fort heureusement, il se laisse libérer pour la dernière fois par Delbert Grady - lequel n'existe, chacun le sait désormais, que dans sa tête malade :
    Pendant ce temps, Danny découvre le sens du mot "Redrum" :
    Et Jack Torrance y va cette fois à fond, et bien qu'en boitant nettement plus suite à sa chute dans l'escalier, il est cette fois-ci beaucoup mieux armé - scène mythique, reprise des milliers de fois, mais jamais égalée :
    Vous la connaissez forcément, mais c'est au moins à revoir une fois :
    Pendant tout ce temps, Dick Halloran - le seul à recevoir le shining, et donc à s'inquiéter à juste titre - a pris l'avion vers l'hôtel, mais il y a quelque chose qu'il n'a pas vu - et qui va le tuer, bien évidemment :
    Jack Torrance n'étant plus qu'un homme dangereux, Danny ne voit d'autre solution que de se réfugier dans le labyrinthe à l'extérieur de l'hôtel, mais il est aussitôt pris en chasse par son père :
    Unique technique possible : retourner en arrière en marchant dans ses propres traces... Ce qui marche, finalement, et va lui permettre de retrouver Wendy pour s'enfuir définitivement, à bord de la seule chenillette encore en marche, celle de Dick Halloran.
    Il est d'ailleurs à noter qu'à ce moment précis, Stanley Kubrick se détache complètement de la poétique musique de Béla Bartok, pour se tourner vers une pièce contemporaine bien plus angoissante, due à Krzystof Penderecki :
    Jack Torrance meurt donc de froid, perdu dans le labyrinthe :
    Si vous souhaitez observer cette longue procédure, avec la musique de Krzystof Penderecki, je vous en prie :
    Mais cela n'explique pas du tout l'ultime plan du film : celui d'une photographie datée du 4 juillet 1921, où l'on voit très clairement Jack Torrance y apparaître en tout premier plan :
    Comme souvent, Stanley Kubrick ne se livre pas à une fin déterminée, mais bel et bien à une hypothèse qui a de multiples interprétations possibles - sur lesquelles je ne reviendrai pas, c'est sûr !
    Le film n'a pas tout de suite été bien classé aux USA - comme d'ailleurs beaucoup d'autres de Stanley Kubrick -, probablement parce qu'il était parti vivre en Angleterre depuis 1962, époque de Lolita. Mais ceci va changer très vite sous le coup de nombreux journaux et chaînes, qui l'estiment comme l'un des films d'horreur les plus efficaces et subtils du monde, notamment Total Film ou Channel 4.
    L'on pourrait certes revenir sur les nombreuses difficultés qui ont entouré ce film, passant du long tournage de presqu'un an aux difficultés propres à Shelley Duvall - qui a du coup tourné certaines scènes plus de 40 fois, sans oublier l'usage du Steadicam, pratiquement neuf à cette époque...
    Mais je préfère m'en tenir à mon opinion, Stanley Kubrick qualifiant cet Opus comme son œuvre la plus personnelle (laissant à Eyes Wide Shut le soin d'emporter le titre de "meilleur film", une journée avant sa mort en 1999)... Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais de mon côté je l'adore toujours, plus de quarante ans après sa sortie, et il me semble toujours absolument parfait, que ce soit au niveau de son jeu d'acteurs, de la façon dont c'est filmé, ou encore de la musique qui y est choisie !

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    8 Comments:

    Anonymous Anonyme said...

    allez,quatre mot sur ton article.
    comme d'habitude , trés bon.
    j'ai vu ça deux ou trois fois y a longtemps.
    bon film, mais je ne pense pas le revisionner,
    bise a toi d'ici

    jeudi, 16 février, 2023  
    Blogger Vincent said...

    Merci, pour l'article "très bon" ! Mais à mon avis, tu as grand tort de ne pas revisionner ce film... Il peut se revoir 20 ou 30 fois, et à chaque fois avec une vision différente, c'est justement ce qui fait sa grande force !

    jeudi, 16 février, 2023  
    Anonymous tadloiducine said...

    Merci pour cette bonne découverte!
    Contrairement à beaucoup de spectateurs, j'aime bien savoir d'avance un peu ce qui va se passer (c'est pour ça que je peux revoir les films qui me plaisent). Je comprends donc enfin à quoi correspond ce visage grimaçant à travers une porte fracassée à la hache...
    Car je n'ai encore jamais vu ni Eyes with Shut ni Shining!
    Vu que dasola est en plein reclassement de sa DVDthèque (qui en avait bien besoin), je viens de voir les films de Kubrick sagement regroupés... et de "tirer" ces deux-là pour les mettre en "vision prioritaire".
    En tout cas, je me souvins que c'est moi qui lui ai fait découvrir Spartacus...
    (s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola

    lundi, 20 février, 2023  
    Blogger Vincent said...

    Si tu as fait découvrir SPARTACUS (le film qu'il estimait le moins), je pense que tu aimeras beaucoup SHINING et EYES WIDE SHUT, deux œuvres qu'il considérait comme les plus réussies de toute sa carrière... Comme tu aimes (contrairement à la plupart des gens) connaître un petit peu à l'avance, je suis très content que tu visites ainsi mon site - qui hélas est assez peu commenté. Merci d'avance !

    lundi, 20 février, 2023  
    Anonymous Chah said...

    Merci pour ce bel article qui me rappelle de bons souvenirs. J'aurais dû mal à le revoir, d'ailleurs je n'ai regardé que ta 1ere vidéo de peur de revoir des scènes terrifiantes. Bien d'accord avec toi, c'est un très bon film. J'aime beaucoup les sujets traités : la folie, la claustration, le passé d'un lieu, etc.
    Eh oui, la musique est excellente !
    Très bon casting aussi. Il ne pouvait pas trouver mieux que Jack Nicholson ;)

    mardi, 21 février, 2023  
    Blogger Vincent said...

    Content que tu soies du même avis que moi, concernant le fait qu'il s'agit en effet de l'un des meilleurs films de Stanley Kubrick - EYES WIDE SHUT, son dernier, étant le seul qu'il plaçait encore au-dessus ! J'ai beau chercher, je ne vois pas ce qu'il y a de raté dans cet Opus : le scénario est parfait, la musique excellente, et le jeu des acteurs proprement hallucinant... Et je suis comme toi, Jack Nicholson n'aurait pu être remplacé par personne d'autre !

    mardi, 21 février, 2023  
    Anonymous tadloiducine said...

    Enfin vu Shining cette semaine. Je mourrai moins bête ;-)
    J'ai trouvé le personnage de Wendy un peu... fade. Comment peut-elle rester avec un homme aussi toxique?
    Le gamin est merveilleux. Prémonitions, télépathie... bien mystérieux, ce fameux "shining" et sa connexion avec le cuisinier.
    J'ai vu que Danny Lloyd n'avait jamais réussi à percer dans le cinéma après ce film, et avait renoncé à une carrière au cinéma vers l'âge de 14 ans: dommage.
    J'avais vu à sa sortie le film Poldergeist: aussi un film d'horreur qui m'avait marqué, à l'époque. Je ne sais pas si je le mettrai pas au même niveau que Shining (même si moins "mythique")?
    (s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola

    jeudi, 13 avril, 2023  
    Blogger Vincent said...

    Oui, c'est sûr que Wendy est un peu au bout d'elle-même, dans ce film... Mais elle a vécu ce tournage comme une véritable horreur, encouragée par Stanley Kubrick, qui n'arrêtait pas de la réprimander - alors qu'il se montrait très calme avec Jack Nicholson. Quand à Danny Lloyd, c'est très dommage pour lui, effectivement... Il n'empêche : SHINING reste quasiment le film le plus parfait sur ce sujet !

    jeudi, 13 avril, 2023  

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