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  • mercredi, janvier 04, 2023

    RAGING BULL (MARTIN SCORSESE)

    Il m'est très difficile de vous parler de ce film sorti en 1980, pour différentes raisons... 1) Il s'agit d'un véritable biopic sur le boxeur Jake LaMotta, mort il y a seulement quelques années 2) C'est le quatrième Opus du désormais célèbre Robert De Niro, qui a déjà tourné dans Mean Streets, l'impeccable Taxi Driver, et New York, New York, tous les trois de Martin Scorsese 3) C'est le seul film de ce dernier entièrement réalisé en noir et blanc - sous le prétexte de couleurs assez ternes -, et d'autre part sur une forte dépendance à la cocaïne, doublée d'une grande dépression liée à son divorce et le faible succès de ses films précédents.

    Inutile de dire que Robert De Niro a énormément participé à cette œuvre, qu'il a lui-même développée à partir de 1974, alors que le sujet - celui de la boxe - ne semblait pas intéresser outre-mesure Martin Scorsese. En outre, il s'est livré à près de 1000 combats avec Jake LaMotta lui-même, ce qui a fait dire à ce dernier qu'il était "quasiment professionnel".

    Peut-être est-ce la raison pour laquelle le titre du film apparaît en couleur, ce qui reste limité à quelques uniques plans - heureusement accompagnés par le fameux opéra Cavalleria rusticana de Pietro Mascagni (1863-1945) :

    En tant que biopic, l'œuvre n'est pas aussi originale que, par exemple, Bird de Clint Eastwood (1988) ou Ed Wood de Tim Burton (1994), mais ceci est dû en grande partie au destin relativement inattendu de Jake LaMotta (Robert De Niro), qui commença par perdre face à Jimmy Reeves, à Cleveland en 1941 - à l'occasion duquel on découvre d'ailleurs le sens de son surnom :
    Bien qu'en réalité gagnant, il est repoussé par tout le groupe, ce qui ne le met pas d'excellente humeur... Mais ceci se rattrape bien vite, lorsqu'il découvre subitement celle qui va être la femme de sa vie, Vickie (Cathy Moriarty) :
    D'autant qu'il est aussitôt encouragé par son propre frère Joey LaMotta (Joe Pesci), qui restera avec lui le plus longtemps possible :
    Jugez-en de vos propres yeux, ce qui ne prendra pas longtemps :
    Il est clair que la douceur se révèle de plus en plus flagrante entre Jake LaMotta et Vickie, ne serait-ce que par la position de son bras :
    Et quand elle regarde la photo des deux frères, elle ne peut pas s'empêcher de sourire :
    Deux ans plus tard, à Detroit en 1943, il finit par gagner, chose totalement imprévisible, contre Ray Robinson - lequel fait la première chute de sa vaste carrière :
    Il est d'ailleurs remarquable de voir la façon dont Martin Scorsese a filmé toutes ces batailles, qui ne sont pas tournées par de très nombreuses caméras situées hors du ring, mais par une seule, bien placée sur un unique protagoniste au sein du ring. Ceci se ressent immédiatement par la tension des scènes en question, qui demandèrent ainsi près d'un mois de tournage, pour seulement dix minutes de combat. 
    Mais Martin Scorsese sait bien trouver une parade à ceci, notamment en s'intéressant au projet qui semble davantage le concerner lui-même - celui lié au divorce d'avec sa propre femme -, qui se retrouve associé à l'attitude de Jake LaMotta, de plus en plus proche de Vickie :
    Là, on est forcément émerveillé par la façon dont le réalisateur aborde tout cela - qui est proprement sensuel, avouons-le :
    Il n'empêche : la même année et au même endroit, Jake LaMotta se fait cette fois-ci bien avoir par Ray Robinson, qui va finir par gagner le round proposé :
    Une explication à cela ? Toujours la même, donnée par le frère... De la domination de gens peu fiables, contre lesquels il est important de se battre quoi qu'il arrive :
    Il se décide alors à lutter contre tout le monde, et là, il faut bien remarquer qu'en dépit du temps qu'ont duré tous ces combats (trois ans), cela passe assez vite à l'écran... Comprenant juste le nom, le lieu et la date, affiché rapidement sur fond noir, autrement dit Zivic (Detroit, 1944), Basora (New York, 1945), Kochan (New York, 1945), Edgar (Detroit, 1946), Satterfield (Chicago, 1946), et Bell (New York (1947) :
    Fort heureusement, ceci est beaucoup moins important aux yeux de Jake LaMotta que la cérémonie tant attendue du mariage avec Vickie... C'est là où nous voyons un peu de couleur apparaître, afin de définir cet endroit du film comme très particulier, parlant de la seule chose véritablement fondamentale à cette époque :
    Même le ring, c'était pour ainsi dire calculé d'avance... Il y avait des probabilités de perte quasiment voisines de zéro :
    Jake LaMotta enchaîne ensuite pas mal de combats, notamment contre Janiro, à New York en 1947 - qu'il gagne également, de justesse :
    Mais cela se dégrade pour lui à un tout autre niveau, celui de sa femme Vickie, avec laquelle il n'a pas couché depuis une éternité... Maintenant qu'ils ont trois enfants, elle ne sert que de soubrette, et cela l'énerve de plus en plus - quelles que soient les paroles rassurantes de Joey LaMotta :
    Après des années de gloire, Jake LaMotta semble désormais pourvu à une autre destinée, comme le prouve sa défaite face à Billy Fox, à New York en 1947 - où il ne franchit pas le 4ème round :
    Mais fort heureusement, il bat, en juin 1949 à Detroit, Marcel Cerdan - le champion français très épris d'Edith Piaf -, qui s'est blessé à l'épaule, et ne peut pas continuer la rencontre à partir du 10ème round :
    De plus, Marcel Cerdan va mourir tragiquement à seulement 33 ans, lors d'un accident d'avion... On pourrait donc croire que Jake LaMotta n'en va que bien mieux, mais c'est tout le contraire qui se produit, avec une jalousie dévorante à l'égard de sa femme - qui n'est pratiquement basée sur rien :
    Curieusement, ceci est filmé d'une façon vraiment hystérique, exactement de la même façon que dans Mean Streets (1973) - où Robert De Niro jouait déjà un bon rôle de déjanté : 
    Et de même que dans ce film antérieur de Martin Scorsese, Jake LaMotta finit toujours par livrer sa véritable pensée - bien qu'il semble qu'il soit déjà trop tard :
    Sur le ring, il souhaite se battre encore une fois contre un français, Dauthuille, à Detroit en 1950... L'adversaire est particulièrement redoutable, et Jake LaMotta manque de s'écrouler complètement, lorsqu'à 13 secondes du dernier round, il finit par remporter la victoire. Du coup, il se décide à faire comme autrefois, vaincre Ray Robinson, mais n'y parvient pas du tout, cette fois :
    Seul motif de satisfaction : il a réussi - nul ne sait comment - à résister au coups de ce dernier, et à ne pas se faire envoyer au tapis :
    Quoi qu'il en soit, il décide alors de prendre sa retraite, à Miami en 1956 - le tout dans une ambiance bien plus sympathique, avec sa femme et ses enfants :
    Du moins, c'est ce qu'il croit... Mais pas pour bien longtemps, puisque Vickie le plaque pour de bon, lassée de voir son mari ne rien faire du tout. Il est d'ailleurs remarquable de constater que Robert De Niro a pris à cette occasion 30 kilos en 4 mois, à tel point que Martin Scorsese a filmé cette section le plus vite possible, afin de ne pas mettre sa santé en danger :
    Toujours est-il qu'il ne reste à Jake LaMotta guère de possibilités à Miami, à part ouvrir une boîte de nuit portant son propre nom, ce qui est la seule chose à laquelle puisse servir sa célébrité...  Mais il se fait vite repérer pour un usage illicite de jeunes filles peu destinées à cela, vu l'âge de 14 ans qu'elles avaient :
    Du coup, il fait plusieurs mois de prison, en 1957, en Floride - où il subit toutes les pressions que l'on peut imaginer :
    Et à sa sortie, il ne cherche qu'une chose, se réconcilier avec son frère Joey, qu'il n'a pas vu depuis bien longtemps - et l'on comprend pourquoi ceci a fort peu de chances de marcher, finalement :
    On a l'impression que les deux hommes ne se connaissent pas du tout, alors que ce n'est bien sûr pas le cas :
    Voici donc comment le film se termine, par une sorte de discours auto-rassurant prononcé devant une glace, et qui n'a plus guère de portées que celle-ci n'en offre :

    Ceci n'était peut-être pas l'œuvre la plus fabuleuse de Martin Scorsese à l'époque, mais elle valu tout de même à Robert De Niro l'Oscar du meilleur acteur, et celui du meilleur montage pour Thelma Schoonmaker - qui fut pratiquement la monteuse de tous ses films, y compris Silence de 2017 !

    Fort heureusement, le réalisateur verra mieux remarqué Raging Bull une dizaine d'années plus tard, lorsqu'il fut considéré comme l'un des meilleurs Opus des années 1980, et comme l'un des plus grands films jamais réalisé sur la boxe - ce qui m'a l'air tout à fait exact, en comprenant également Million Dollar Baby de Clint Eastwood, sorti en 2004. Tout comme Martin Scorsese, je suis relativement indifférent à ce sport, qui me paraît inutile et dévastateur... Mais réaliser un film grandiose en parlant d'une vie en fin de compte terrible, ça me semble tout simplement prodigieux !

    Autres films du même réalisateur : Taxi DriverAfter HoursCape FearBringing Out the DeadAviatorSilence

    Autres biopics (avec entre parenthèses la date du film, et le nom de la personne traitée) : Patton (1970, George Patton), Barry Lyndon (1975, Barry Lyndon), Elephant Man (1980, John Merrick), Bird (1988, Charlie Parker), Ed Wood (1994, Ed Wood), Braveheart (1995, William Wallace), A Straight Story (1999, Alvin Straight), The Insider (1999, Jeffrey Wigand), Ali (2002, Cassius Clay), Frida (2002, Frida Kahlo), Girl with a Pearl Earring (2003, Johannes Vermeer), Marie-Antoinette (2006, Marie-Antoinette), The Last King of Scotland (2006, Idi Amin Dada), La Môme (2007, Edith Piaf), Into the Wild (2007, Christopher McCandless), Silence (2017, jésuites portugais)

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    lundi, octobre 24, 2022

    SILENCE (MARTIN SCORSESE)

    Certes, ce n'est pas la première fois que je parle de Martin Scorsese, mais je voulais mentionner ce film exceptionnel sorti en 2017, et réalisé d'après un livre de Shûsaku Endô (1966), qui parle de l'apostasie du XVIIème siècle au Japon :

    Comme très souvent, c'est totalement génial et entièrement véridique, mais par contre, ça dure assez longtemps (2h40), et c'est interprété par des acteurs assez peu connus (à part Liam Neeson)... Ce qui ne signifie pas qu'ils soient mauvais, loin de là, mais cela justifie au moins le passage par ce trailer, nécessaire à ceux qui ne l'ont pas encore vu :
    Pour une fois, je vous livre sa photo, fort sympathique malgré son âge... Après La Dernière Tentation du Christ (1988) et Kundun (1997), celui-ci est le troisième Opus que Martin Scorsese consacre à la religion, et non sans peine, puisqu'il rêvait déjà de le faire autour des années 1990 - en plus avec trois personnes bien connues, Benicio del Toro, Daniel Day-Lewis et Gael Garcia Bernal, qui n'ont hélas pas pu y participer en 2017 :
    Venons-en maintenant à la véritable histoire dont il est question : au départ, ceci se passe encore à Macao, où le père Sebastião Rodrigues (Andrew Garfield) et le père Francisco Garupe (Adam Driver) sont très inquiets de la disparition au Japon de Cristovão Ferreira, qui aurait abjuré sa foi catholique une fois torturé sur le mont Unzen... Ils décident donc tous les deux de partir pour l'île, où ils sont bien accueillis par les habitants de Tomogi, qui pratiquent eux aussi le christianisme en secret :
    Mais cela n'est pas du tout facile, comme se le dit de plus en plus souvent Sebastião Rodrigues, confiné dans une hutte, avant de partir pour le village de Goto, encore plus chrétien :
    Il a certes de bons entretiens avec certains membres du village :
    Mais d'autres bien plus complexes avec le très déroutant Kichijiro (Yôsuke Kubozuka), qui l'a fait traverser dès le début par le bateau, et apparaît là sous un jour très différent, comme un chrétien s'étant livré au piétinement de l'image de Jésus (fumi-e), avant de voir toute sa famille brûlée vive par les hommes de Inoue, le Shôgun le plus puissant du Japon :

    Le même Inoue réapparaît d'ailleurs au centre de Tomogi, où il prend à nouveau quatre otages, leur ordonnant non seulement de pratiquer le fumi-e, mais aussi d'aller plus loin, cracher sur la croix de bois et insulter la vierge Marie... Ce qu'à part Kichijiro, aucun n'est capable de faire, ce qui justifie leur propre crucifixion :

    Trois croix plantées dans la mer montante, ce qui va prendre des jours avant qu'ils ne soient définitivement morts, dans les plus atroces conditions possibles :
    Ceci est magnifiquement filmé, et vous savez bien sût à qui nous devons cet exploit :
    Une fois de plus, Kichijiro se voit encore obligé de demander à Sebastião Rodrigues de l'absoudre, ce que ce dernier fait avec patience, mais de moins en moins convaincu de l'utilité de cette pratique :
    Plan superbe que l'on découvre environ à la moitié du film : celui de Sebastião Rodrigues se contemplant dans une sorte de miroir... Où il voit à sa place le Christ lui apparaître, et il ne sait pas trop quoi en penser :
    D'ailleurs, tout se dégrade de plus en plus, à commencer par l'inquisition habituelle :
    Suivi une nouvelle fois par la mise en prison du déroutant Kichijiro :
    Et peu de temps après, de Sebastião Rodrigues, où il va voir non seulement la décapitation d'un homme ayant refusé le fumi-e, mais aussi la noyade de quatre chrétiens japonais, en plus soldée par la disparition en mer de son collègue Francisco Garupe - qui est revenu au mauvais endroit au mauvais moment :
    Nous voici donc au dernier tiers du film, où l'on découvre enfin l'ancien père Cristovão Ferreira (Liam Neeson, qui avait déjà participé à Gangs of New York en 2002), qui n'est pas du tout mort sur le mont Unzen, comme on le croyait au tout début :
    Nous découvrons en fait sa propre histoire ici, qui ne s'avère pas spécialement sympathique :
    Lui et Sebastião Rodrigues se retrouvent en fait  dans une petite prison, où Cristovão Ferreira se sent obligé de lui raconter ce qu'il a vécu durant ces quinze dernières années, cruciales dans le sens où il a pu prendre conscience de l'absurdité de la religion catholique - en tous cas au Japon, où seul Bouddha et le soleil règnent sur le monde :
    Mais Sebastião Rodrigues ne se trouve pas du tout prêt à entendre ceci, même si visiblement parrainé par plus d'une personne (peut-être Mokichi ?) :
    En plus, il se trouve même aidé par un traducteur et assistant (Tadanobu Asano), lequel se révèle fort courtois et sympathique :
    Inutile de dire que sa conversion est essentielle pour Inoue (Issei Ogata), qui commence de façon assez délicate... Mais vu que ça ne marche toujours pas, il entreprend de torturer à nouveau cinq chrétiens, à la fois saignés et pendus par les pieds, laissant ainsi Sebastião Rodrigues au pardon de lui-même, et finalement à l'accomplissement du fumi-e, piétiner l'image du Christ :
    Ceci laisse désormais toute sa place à Cristovão Ferreira - qui se nomme depuis Sawano Chuan, et est marié avec une japonaise :
    Et il va assez vite en aller de même pour Sebastião Rodrigues, qui va prendre le nom, la femme et l'enfant d'un japonais mort, Okada San'emon, et vivre désormais dans ce pays en tant qu'inspecteur des navires étrangers, afin de vérifier qu'ils ne transportent pas d'objets catholiques :

    Ce qui ressemble étonnamment à un tableau hollandais de la même époque, n'est-ce pas ? Il est d'ailleurs dommage de ne pas posséder le DVD du film, car toute sa fin est basée sur la présence des seuls hollandais au sein du Japon, y compris la voix du narrateur Dieter Albrecht - mais merci à ARTE d'avoir été la seule chaîne à oser diffuser ce chef-d'œuvre !

    Vous vous demandez sans doute ce qui m'a beaucoup plu dans ce film, hormis ma passion pour le Japon, et le fait que j'ai été marié durant une dizaine d'années avec une femme de ce pays - qui, plus grand des hasards, se prénommait justement Fumie (piétiner le visage du Christ)...

    Je ne sais par où commencer, qu'il s'agisse de mon admiration envers tout ce qu'a fait Martin Scorsese, ou bien de ma méfiance envers le catholicisme, que je trouve assez inadapté au XXème siècle, en tous cas bien moins que le bouddhisme. Toujours est-il que son point de vue est très juste, jamais franchement d'un côté ou de l'autre (comme les gens de cette époque, sans cesse tournant et retournant autour de la vérité), et je trouve cela tout à fait approprié à ce genre de narration, parfaitement objectif face au point de vue religieux, que nous ne pourrons jamais véritablement imposer ou dénigrer. Bravo, donc, à Silence et à Martin Scorsese ! 

    Autres films du même réalisateur : Taxi DriverRaging BullAfter HoursCape FearBringing Out the DeadAviator

    Autres biopics (avec entre parenthèses la date du film, et le nom de la personne traitée) : Patton (1970, George Patton), Barry Lyndon (1975, Barry Lyndon), Raging Bull (1980, Jake LaMotta), Elephant Man (1980, John Merrick), Bird (1988, Charlie Parker), Ed Wood (1994, Ed Wood), Braveheart (1995, William Wallace), A Straight Story (1999, Alvin Straight), The Insider (1999, Jeffrey Wigand), Ali (2002, Cassius Clay), Frida (2002, Frida Kahlo), Girl with a Pearl Earring (2003, Johannes Vermeer), Marie-Antoinette (2006, Marie-Antoinette), The Last King of Scotland (2006, Idi Amin Dada), La Môme (2007, Edith Piaf), Into the Wild (2007, Christopher McCandless)

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