Après vous avoir parlé de Black Rain, tourné au Japon par Ridley Scott (1989), je vais maintenant en venir à un film de ce pays, intitulé Battle Royale (2000), quasiment le dernier Opus de Kinji Fukusaku (1930-2003), déjà très célèbre en Orient, mais devenu subitement incontournable en Occident, remportant au moins cinq fois la mise initiale - d'environ 5 millions de dollars !
Au départ basé sur un roman de Kôshun Takami (1999), également promis à un grand succès, cette œuvre appartient à l'espèce rarissime de films inclassables, dont j'ai fait quelques expériences ici (notamment avec Being John Malkovich). Inutile de dire que Kinji Fukusaku a nettement influencé Takeshi Kitano, John Woo et Quentin Tarantino, j'y reviendrai plus tard... Pour l'heure, démarrons déjà avec la marque principale, Tôei Company, l'une des plus grosses entreprises de distribution de films dans ce pays :
Il faut le dire, ça a l'air de commencer très bien, avec cette vue sur l'océan accompagnée du sublime Requiem de Verdi... Mais cela ne va durer que le générique, et nous sommes immédiatement entraînés vers une vidéo bien moins plaisante, où s'exprime la précédente (et unique) vainqueuse de Battle Royale il y a quelques années :
Nous sommes donc confrontés à cette expérience unique, Battle Royale (une bataille rassemblant quarante lycéens tirés au sort, ayant lieu une fois par an), et à son grand chef, Takeshi Kitano, pour une fois simplement acteur... Mais il a dû remplacer Kinji Fukusaku, gravement malade, pour le tournage de Violent Cop en 1989, ce qui lui donnera accès à la réalisation, avec le grand succès que l'on connaît :
Ces étudiants de terminale ont l'air pour l'instant très rassurés, dans ce bus qui les emmène sur leur lieu de concours :
Mais il va en aller autrement, lorsque les 40 élèves réunis apprendront qu'un seul d'entre eux devra survivre à ce processus de trois jours, ce qui est explicité par une vidéo en apparence très sympathique :
Il leur suffira de mémoriser trois règles très simples... 1) D'une part, en suivant l'heure très précisément donnée, ne pas se rendre sur certaines zones clarifiées d'avance :
2) Ne surtout pas essayer d'enlever le collier explosif dont chacun est désormais pourvu... Sinon, cela débouchera uniquement sur ceci, dont le chef Takeshi Kitano a été obligé de recourir sur Yoshitoku Kuninobu, l'un des deux premiers élèves disparus :
3) Enfin, chacun des élèves sera pourvu d'une arme aléatoire, disponible dans le sac de survie qui leur est livré, et qui peut aller du révolver à une arbalète ou une simple paire de jumelles :
Ce qui est une fois de plus rappelé par la fille enthousiaste de la vidéo, qui a profité d'une très pratique hache :
Peut-on savoir le sens de tout cela ? En fait, dans un futur débordant de montée de violence et de rébellion chez les jeunes, les adultes ont définitivement voté la loi Battle Royale, impliquant le combat d'une classe de terminale tirée au sort, jusqu'à ce qu'il n'en reste plus qu'un. Et comme le dit Takeshi Kitano, "La vie est un jeu" :
En tous cas, l'introduction est terminée, et les 40 élèves sont livrés à eux-mêmes dès le premier jour sur le début de Battle Royale, dans une île déserte du Japon :
Qui évidemment, se déroule comme prévu... Avec les premiers résultats affichés sur l'ordinateur très sophistiqué dont disposent les forces de l'ordre :
Mais il en va différemment suivant les élèves, certains se montrant très réfléchis et intelligents, d'autres pratiquement débiles ou pervers... Sans oublier ceux qui ne veulent absolument pas jouer à ce jeu, leur seul souci étant de s'en sortir indemne :
Désolé, je ne me rappelle plus de leurs noms... Mais ces deux-là passent un message qu'ils estiment très important à Yukiko Kitano et à Yumiko Kusaka, deux jeunes filles qui ont l'air de partager la même idée :
Malheureusement, les deux élèves se font descendre par Kazuo Kiriyama, le "volontaire", qui fut comme par hasard réuni à la classe juste "pour s'amuser"... Incroyable, n'est-ce pas ? En tous cas, les deux restants ont bien du mal à s'en convaincre :
Même s'il leur reste un peu d'espoir, consistant dans un travail encore mystérieux sur un ordinateur :
Apparaît enfin la très énigmatique Takako Chigusa, réputée comme étant la plus belle élève de sa classe et une grande sprinteuse, ayant beaucoup de mal à se lier avec d'autres jeunes filles. Mais vous la connaissez forcément, non ?
Mais si... En réalité (c'est l'une des rares fois où je livre ce détail), elle s'appelle Chiaki Kuriyama, et interprétera en 2003 la sadique Gogo Yubari dans le très célèbre Kill Bill de Quentin Tarantino :
Comme quoi, ce n'est pas rien, que Tarantino ait déclaré en 2009 que Battle Royale était son film favori ! Toujours est-il que dans cet Opus, la jeune Takako Chigusa résiste comme elle le peut aux avances perverses de Kazushi Niida, qu'elle finit par abattre de ses propres mains, avant d'y passer à son tour :
En résumé, la première journée se termine donc avec 20 morts... Ce qui semble un peu léger aux yeux de Takeshi Kitano, qui ne peut s'empêcher de le rappeler à l'ébauche du second jour :
Journée où se prépare quelque chose d'inédit, une véritable bombe, ce qu'un nommé Shinji Mimura s'empresse de mettre en place avec l'aide de deux amis, Keita Iijima et Yutaka Seto :
Pendant ce temps, c'est malheureusement la plus grande confusion qui règne au sein d'une équipe de filles veillant sur Shûya Nanahara : une assiette destinée à l'empoisonner est livrée par erreur à Yuka Nakagawa, ce qui la tue instantanément. Dans la panique, Satomi Noda s'empare d'un pistolet-mitrailleur, et tue Chisato Matsui, Haruka Tanizawa, en blessant au passage Yukie Utsumi :
Laquelle, se sentant coupable, prononce cette phrase symbolique, avant de se suicider en sautant du haut du phare :
En revanche, le plan de l'ordinateur marche très bien, puisque l'armée devient d'un seul coup incapable de contrôler quoi que ce soit, qu'il s'agisse des lieux interdits à certaines heures, ou encore de l'explosion éventuelle des colliers de chacun :
Ce qui laisse tout le temps à Shinji Mimura, Yutaka Seto et Keita Iijima pour terminer à temps la fameuse bombe, qu'ils sont sur le point de balancer sur l'école :
Hélas, le "volontaire" Kazuo Kiriyama se trouve au même moment sur les lieux, et bien que la bombe finisse tout de même par exploser, il va réussir à tuer tout à la fois Yutaka Seto, Keita Iijima et Shinji Mimura :
Résultat presque final ? Il ne reste que trois êtres vivants : Shûya Nanahara, relativement blessé, la jeune fille Noriko Nakagawa, et le principal d'entre eux, Shôgo Kawada... Il est temps de se rappeler que ce dernier, tout comme le "volontaire" Kazuo Kiriyama, faisait également partie des deux sélectionnés en plus pour s'intégrer à l'équipe de façon arbitraire :
Il a d'ailleurs déjà participé à Battle Royale trois ans plus tôt, et ne vise qu'une chose évidente : être le dernier et le seul survivant... Shôgo Kawada va donc en finir très rapidement avec les deux derniers, même si cet acte a beaucoup de mal à être compris par ceux qui regarde le film pour la première fois :
Et du reste, pour cause... Puisque cette exécution n'a été qu'une simple feinte, destinée à se rapprocher tous les trois du grand chef de cette mission aberrante, Takeshi Kitano :
Lequel ne peut s'empêcher de déclarer son sentiment à l'égard de Noriko Nakagawa - que celui-ci soit vraiment réel, ou juste imaginé par la jeune fille :
En tous cas, il est abattu par cette dernière, cette fois-ci de façon définitive - du moins, on l'espère :
Shûya Nanahara, Noriko Nakagawa et Shôgo Kawada s'en estiment pour le moins bien contents :
On voit comme ultime tableau celui de la jeune fille triomphant de tous les autres morts, peint au dernier moment par le grand chef Takeshi Kitano - bien qu'il s'agisse d'une vraie toile de Takeshi Kitano (désolé, mais son nom d'acteur est pour une fois le même que son nom réel) :
Malheureusement, Shôgo Kawada décède peu de temps après, suite à sa fatigue et à ses blessures... Résultat : il ne reste que Shûya Nanahara et Noriko Nakagawa, éperdument amoureux l'un de l'autre, et marchant cette fois-ci dans un Japon civilisé, entourés de nombreuses personnes inoffensives :
Ceci veut-il dire qu'il est légal d'être deux personnes à gagner Battle Royale ? Sûrement pas, comme le montre ce dernier plan :
Ce que j'en pense ne vous intéressera certainement pas, mais je tiens tout de même à le dire : ce film nécessite au moins deux visions, ne serait-ce que pour s'adapter d'une part à ses nombreux personnages, à leur façon très particulière de fonctionner, et d'autre part pour bien faire la différence entre sa réalisation en apparence très sérieuse - laquelle lui a valu l'enthousiasme délirant de tous les jeunes de l'époque -, et sa conception par contre beaucoup plus à double tranchant, carrément humoristique par moment, et digne de l'âge très avancé de Kinji Fukusaku, dont c'était le dernier Opus à 70 ans.
Si vous ne l'avez pas encore vu, je n'ai hélas pas trouvé de bonnes vidéos... Mais vous en avez un très bon résumé dans ce trailer :
Ai-je parlé de la musique ? Je ne crois pas... Mais je me rattrape avec Masamichi Amano, qui est non seulement un excellent compositeur, mais en outre superpose à sa très bonne musique une base classique invincible, due à Bach, Schubert, Strauss et Verdi.
Dernière vidéo, pour ceux qui le souhaitent : une très rapide vue sur les différents acteurs, vus à la fois au moment du film, puis bien après... Ce qui prouve, mine de rien, qu'ils survivent :
Inutile de vous dire que j'adore la dernière œuvre de Kinji Fukusaku, même si je ne la regarde pas aussi souvent qu'elle le mérite... En tous cas, j'espère que vous l'aimerez beaucoup, de même que le fameux Kill Bill de Quentin Tarantino, ou encore les films de Takeshi Kitano, tout d'abord Zatoichi, puis le tout premier, Violent Cop, et enfin les mystérieux Dolls et Sonatine. Bon courage !
Le premier film de la série ? Bien sûr que non ! C'est le fait de Die Hard (1988), tourné par le même réalisateur, suivi ensuite par Die Hard 2 (1990, Renny Harlin), puis bien après par le beaucoup plus décevant Live Free or Die Hard (2007, Len Wiseman)... Au milieu de tout cela, nous avons fort heureusement Die Hard with a Vengeance (1995), qui a pratiquement fait le meilleur score du monde, et ceci pour une bonne raison :
Comme c'en est le cas avec Indiana Jones de Steven Spielberg ou Lethal Weapon de Richard Donner - tous en quatre films -, celui-ci a pour originalité de rajouter un nouveau personnage très important, allant au départ assez mal avec le héros principal. Dans le premier cas, il s'agissait de Sean Connery (opposé à Harrison Ford), dans le second de Rene Russo (face à Mel Gibson et Danny Glover), et enfin dans celui-ci de Samuel L. Jackson, tombant par hasard sur Bruce Willis.
Autre phénomène particulièrement sensible : le film se livre sur ces deux personnages au jeu du chat et de la souris, sans compter la présence d'un troisième individu, à la tête de tous les évènements imprévus qui apparaissent d'un bout à l'autre... A commencer par cette explosion en plein cœur de New York, juste pour rire, dira-t-on, et aux fins de bien définir le rôle fondamental de chacun :
L'inspecteur Walter Cobb (Larry Bryggman) reçoit un coup de fil anonyme d'un nommé Simon, qui concerne le lieutenant John McClane (Bruce Willis)... Cela tombe très mal, car John est depuis un certain temps suspendu de ses fonctions, souffre d'une bonne gueule de bois, et doit comme par hasard débarquer dans Harlem en portant un panneau disant tout simplement "I hate niggers" :
Par grande chance, il tombe sur Zeus Carver (Samuel L. Jackson), électricien et antiquaire afro-américain, qui sort vite de sa boutique pour le sauver d'un lynchage public pour racisme :
Pour tout dire, ces deux-là se révèlent au départ plutôt incompatibles : d'un côté, John sort mal de sa cuite, et s'avère somme toutes assez raciste... De l'autre, Zeus semble à l'opposé très calme, cultivé, et prêt à tout pour le sauver des autres noirs, de plus en plus dangereux !
Du coup, ils partent à toute vitesse dans une voiture volée au dernier moment, même si cela leur attire quelques ennuis :
Arrivés enfin au commissariat, ils reçoivent tous deux les ordres de l'énigmatique Simon, qui consiste à se rendre à un téléphone près d'un métro de la 72ème rue... Une fois sur place, ils reçoivent un coup de fil trompeur, leur imposant une sorte de calcul assez difficile à gérer :
Mais Zeus trouve la bonne solution, non seulement parce qu'il est à jeun, mais surtout car il a démasqué tout de suite le piège de la question - dont l'origine n'était pas le nombre de chats, mais juste celui d'un seul homme, donc un numéro qui se termine par un 1 :
Du coup, ils obtiennent une menace bien plus réaliste de Simon, consistant à se rendre à une station de métro de Wall Street en moins de 30 minutes... Vu que c'est pratiquement impossible, Zeus se résout à garder le taxi, tandis que John décide d'emprunter le métro, malgré toutes les difficultés qu'il encourt :
John y parvient, mais une fois à l'intérieur du métro, il s'aperçoit qu'une bombe piégée se trouve déjà en charge, et qu'il n'a plus qu'une chose à faire, la jeter le plus vite possible à l'arrière du train :
Cela provoque immédiatement une explosion, car Simon a estimé que John ne s'était pas encore rendu à la gare - même si Zeus était déjà sur place, et tentait de convaincre un policier de sa bonne foi :
Vous trouvez la musique très efficace, n'est-ce pas ? Normal, vu qu'elle est due à Michael Kamen, qui avait déjà accompagné les deux premier Opus - sans même parler des antérieurs Dead Zone de David Cronenberg, de Brazil de Terry Gilliam, ou de Lethal Weapon de Richard Donner...
Totalement déjoué par le fait, John n'a plus qu'à monter dans la voiture de l'inspecteur Walter Cobb, où il rencontre deux nouveaux enquêteurs du FBI... Et bien sûr, il finit par comprendre que la voix de Simon ressemble étrangement à celle de Hans Gruber - autrement dit, celui qu'il avait poussé du toit dans le premier Die Hard, son frère :
Au même moment, une alerte se transmet rapidement vis-à-vis d'une école inconnue, où doit à nouveau exploser une bombe - visant cette fois-ci les enfants... Ceci a beau être totalement faux, personne ne le soupçonne encore, et le travail de tous les policiers s'avère hallucinant :
Ainsi vient pour Simon l'occasion de se montrer tel qu'il est (Jeremy Irons), et d'accomplir sans plus tarder ce pour quoi il est venu :
Pendant qu'il investit sans difficulté la réserve fédérale - autrement dit, 140 milliards de dollars -, il laisse son amie accomplir la partie la plus brutale de son acte :
John et Zeus se rendent durant ce temps à Central Park, non pas sur la route, mais via le parc lui-même... Ils parviennent, de justesse, à résoudre une nouvelle énigme proposée par Simon - ce qui ne les met pas pour autant à l'abri :
Du coup, ils se séparent, puis John traverse le tunnel avec l'aide du camionneur Jerry Parks (Joe Zaloom), abattant au passage quelques concurrents... S'en rendant très vite compte, Simon décide de faire sauter le barrage, mais John réussit à fuir l'inondation déclenchée :
Il retrouve miraculeusement Zeus en voiture, avec qui il décide d'embarquer sur le vaisseau - sur lequel se trouvent d'après eux les 140 milliards de dollars récoltés :
Mauvaise idée, car ils sont pris et enchaînés par Simon... Ils réussissent toutefois à se libérer, puis à sauter in extremis du bateau - sur lequel d'ailleurs ne se trouvait aucun or, vu que Simon se fait un grand plaisir dès le début à enchaîner ses devinettes :
Se croyant totalement à l'abri, Simon fête donc son immense victoire avec tous ses amis, tout aussi bien allemands que russes :
Mais c'était sans compter avec la dernière intervention de John, qui se voit repéré à la dernière minute :
Il finit par abattre l'hélicoptère de Simon, en le faisant couper froidement par une ligne électrique :
Tout serait donc terminé ? A priori, John et Zeus étant maintenant de très bons amis, rien ne semble impossible... Mais c'est son coup de fil manqué à son ex-femme qui le rend d'un seul coup aussi irascible qu'au tout début - ce qui donne envoi au générique de fin, et du coup à un nouveau - et plus décevant - Live Free or Die Hard (2007) :
Inutile de vous demander si vous avez bien aimé ce film, je suis pratiquement sûr que oui... Ce dont je m'excuse par contre, c'est l'impossibilité de décrire ce chef-d'œuvre conformément à sa construction, c'est à dire : d'une grande précision, avec une intrigue de plus en plus poussée, un rythme impeccable, au moins trois acteurs excellents, et enfin une musique parfaite !
En tous cas, Die Hard with a Vengeance eut un budget final fabuleux, quasiment égal à quatre fois la somme initiale, récompensé à cet égard par Goldene Leinwand en 1995, et remporta l'année suivante le BMI Film Music Award - grâce encore une fois à Michael Kamen... C'est très bien, n'est-ce pas ?