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  • lundi, janvier 12, 2009

    MULHOLLAND DRIVE (DAVID LYNCH)

    Enfin, enfin, enfin...
    Depuis le temps que je vous promets que je vais m'y mettre, me voici enfin résolu à vous parler un tout petit peu de cet OVNI total (daté de 2001), dans lequel je n'ai commencé à me repérer qu'à partir du quatrième ou cinquième visionnage, et auprès duquel Lost Highway pourrait presque passer pour le parangon d'un classicisme absolument échevelé :
    Alors bon. Loin de moi l'idée d'en livrer la moindre analyse, non seulement parce que David Lynch, tout comme Stanley Kubrick, déteste ça par principe, mais surtout parce que quelqu'un l'a déjà fait bien avant moi, plan par plan, en plus !
    Je vais donc plutôt me borner à relever certains aspects, certains tics de l'auteur, certaines images chocs telle que celle-ci, l'exemple type de ce que les amateurs nomment à juste titre la magie David Lynch, autrement dit un simple plan sur un panneau nocturne qui chez n'importe qui d'autre serait totalement anodin, et qui de sa part (notamment grâce au mixage son, qu'il tient toujours à superviser) suffit à glacer le sang, tout autant que les fameux plans fugitifs sur les forêts de Twin Peaks :
    Certes, de mixer les sons à brouiller les pistes, il n'y avait qu'un pas, que Lynch s'est bien sûr allégrement empressé de franchir dans la jaquette du DVD, où je serais prêt à parier que les trois quarts des pistes qu'il est censé nous offrir, sont en réalité des leurres :
    Sinon, peut-être, les deux premières, où de fait, avant même le générique début, ce jeu d'ombres et lumières de part et d'autre de l'écran, ainsi que la vision complètement fantasmatique de l'héroïne principale au travers de ses parents / oncles / tantes (?), laisse déjà augurer du thème central des trois derniers films du maître, la schizophrénie :
    Alors certes, je pourrais tenter de vous résumer la toile globale du film, en commençant par le monstrueux accident fondateur - qui à lui tout seul est déjà une sorte de mise en abîme de la collusion de personnalités que suppose la schizophrénie :
    Mais comme tout ceci a déjà été fait bien avant et bien mieux que moi, je préfère me concentrer sur certaines scènes parallèles, telles que celle-ci :
    Un exemple parmi d'autres du talent de David Lynch en tant que directeur d'acteurs (et pourtant, il est réputé pour ne pas leur mettre la pression, justement) : deux simples petits rictus, et l'on sent déjà que tout le monde est mort de trouille, y compris le spectateur !
    À juste titre, outre l'importance symbolique du circuit fléché - que j'ai retrouvé récemment dans l'ultime scène du sublime Collateral de Michael Mann, avec les mêmes implications terrifiantes :
    Autre trait récurrent chez David Lynch : ces personnages amorphes, infirmes ou sans visage, qui de leurs improbables appartements semblent tirer toutes les ficelles d'une façon parfaitement glaciale et énigmatique. On pense bien sûr d'emblée à Sailor et Lula, où cet aspect est très présent :
    Bien évidemment, l'une des histoires et des problématiques principales du film, c'est que de même qu'en politique, tout le monde ne vise bien sûr qu'une seule chose, mettre son cul au meilleur endroit possible du monde :
    Avec toutes les compromissions que cela implique (à noter, pour la petite histoire, que l'acteur de gauche, Angelo Badalamenti - le musicien attitré de Lynch depuis les tout débuts - était paraît-il "excité comme une puce" à la simple idée de jouer un vrai rôle dans l'un de ses films) :
    "This is the girl" !
    Mais quelle clef faut-il posséder pour, justement, être "the girl" ?
    Là, je suis gentil avec vous... Car l'une de ces clefs, c'est justement : "Je ne sais pas qui je suis" (et pour cause)...
    Petit interlude : David Lynch sait tout de même nous détendre cinq minutes avec certaines scènes à pisser de rire, comme celle où le réalisateur surprend sa femme avec le nettoyeur de piscine, et ne trouve rien de mieux pour se venger qu'à barbouiller tous ses bijoux en rose, géantissime, mine de rien !
    Mais bien sûr, c'est reculer pour mieux sauter, avec cette scène nocturne à vous glacer les sangs, malgré les apparences :
    No way out : "This is THE girl" !
    Et je ne suis pas le seul à le dire :
    "This is THE girl" !... Ou bien "This was THE girl", ou "This will be THE girl" !... Allez savoir ?
    Mine de rien, il s'agit de l'une des scènes clefs du film : lorsque la brune adopte la perruque de la blonde, dans une sorte d'acte mi-homosexuel mi-narcissique totalement fantasmatique, mais très lourd de sens...
    Et là, je dois bien avouer à ma grande honte que c'est le moment pile et précis où j'ai complètement décroché à la toute première vision du film, lancé bien malgré moi sur une optique somme toute très discursive et même - disons-le - partiellement hollywoodienne, qui au bout d'une petite heure bifurque d'un seul coup sur un truc totalement barré ! Ce n'était pourtant pas faute, de la part de David Lynch, d'avoir mis les points sur les "I" à ce moment précis du film :
    Et voilà... C'était l'une des clefs. Si maintenant vous n'avez pas encore vu le film, et désirez vous garder intact tout le mystère de la chose, arrêtez-vous tout de suite de me lire, car tout ce qui va suivre va être un gros spoiler !
    Il n'y a pas d'histoire, et pourtant, on en comprend une...
    Il n'y a pas d'auteur, et pourtant, il y en a un...
    Il n'y a pas d'actrice, et pourtant, il y en a une...
    Notamment lors de cette séquence de champs/contrechamps très éprouvante, où grâce à la seule magie du cinéma, l'on se rend compte que cette pauvre fille totalement perdue, tant sa quête de gloire hollywoodienne est immense, ne fait finalement que se parler à elle-même, dans un désespoir absolument sans borne (sublime et très émouvante Naomi Watts) :
    Sans même parler de cette scène encore plus hallucinante (attention, le contrôle parental n'est pas activé sur ce site, adoncques, prenez vos responsabilités) : celle où Naomi Watts se fantasme en train de faire l'amour avec son double :
    Et qui s'avère en réalité être une scène de branlette particulièrement douloureuse et traumatisante (une fois de plus, à ne pas mettre devant tous les yeux !) :
    Durant laquelle se révèlent d'un seul coup (et sans doute, pour David Lynch, d'une façon assez cathartique) une bonne part part des énigmes du film :
    - Qui est qui ?
    - Qui est vivant, qui est mort ?
    - Qui préfère le suicide à une vie de merde, et surtout à une vie sans gloire ?
    "Très souvent, au cours de notre existence, nous voyons nos rêves déçus et nos désirs frustrés, mais il faut continuer à rêver, sinon notre âme meurt" (Paolo Coelho). Mais là, il faut bien admettre que c'est tout de même très mal barré pour cette pauvre petite, quoi...
    Bref ! Un chef-d'œuvre, certes, mais un chef-d'œuvre très ardu, du moins à la première vision... Mais après tout, ce n'est pas un scoop, il en va exactement de même avec l'Ulysse de James Joyce, les Diabelli de Ludwig van Beethoven, ou l'Art de la Fugue de Jean Sébastien Bach... Des créations monstrueuses qui défient presque toute intelligence terrestre, et qui sont tellement vastes qu'elles peuvent largement suffire à nourrir notre esprit toute une vie,...
    Comme je pense l'avoir déjà dit en ces pages, s'il y a un seul avantage au vieillissement, je crois que c'est celui-ci, l'unique : pouvoir, à force de pratique et d'expérience, pouvoir pénétrer - je ne dirais pas de plus en plus facilement, mais disons de moins en moins difficilement - des énigmes telles que celles-ci...

    Autres films du même réalisateur : ErasedheadElephant ManWild at HeartLost HighwayA Straight Story

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    10 Comments:

    Blogger Fremalo said...

    bonjour Vincent

    je reviendrai lire à tête reposée ton billet sur ce film et surtout ce réalisateur que j'adore car là pas trop le temps de trainer ...boulot m'attend

    donc je te laisse pour l instant mais compte sur moi je reviendrai

    bonne journée

    jeudi, 15 janvier, 2009  
    Blogger Vincent said...

    Pas grave, pas grave... Pour tout dire, il y a près d'un an que j'avais archivé tous ces "snapshots" du film, et que je n'avais pas encore osé m'y frotter, lol !
    Mais bon, voilà, ce soir, c'était le "BON" soir, où j'avais envie de parler de ce film trop barré, quoi...
    Et bien sûr, ceci n'est encore qu'une probable ébauche, cela sera vraisemblablement mieux dans les jours suivants !

    jeudi, 15 janvier, 2009  
    Blogger startine said...

    Hello Vincent,

    ma fille m'a offert le VHS de Mulholland pour mon anniversaire voici 3 ou 4 ans… et je ne l'ai toujours pas regardé (je l'avais loupé au cinéma et en fait je ne regarde jamais de DVD parce que je n'ai pas le courage de lire le mode d'emploi de l'appareil).

    En lisant ton billet, je me dis qu'il y a intérêt à être en forme au niveau neuronal, le jour où je me lancerai dans ce film labyrinthesque !!!

    vendredi, 16 janvier, 2009  
    Blogger Vincent said...

    Pas forcément... On peut aussi se laisser emporter par l'oeuvre sans trop chercher à l'analyser. Grâce à la beauté des images et la perfection de la bande-son, ça marche tout seul !
    Sinon (je m'amuse avec ton lapsus, là), effectivement, il vaut mieux ne pas essayer d'introduire une VHS dans un lecteur de DVD, il risque de ne pas apprécier, lol !
    Je ne sais pas de quel appareil tu disposes, mais chez moi, le mode d'emploi est le suivant : 1) mettre de DVD 2) appuyer sur "Play". Et ça marche !

    vendredi, 16 janvier, 2009  
    Anonymous Anonyme said...

    "Autre trait récurrent chez Lynch : ces personnages amorphes, infirmes ou sans visage... "

    comme le génialissime Elephant man!

    "Très souvent, au cours de notre existence, nous voyons nos rêves déçus et nos désirs frustrés, mais il faut continuer à rêver, sinon notre âme meurt"

    Et Dieu sait que c'est pas toujours facile!

    "Un chef-d'oeuvre, certes, mais un chef-d'oeuvre très ardu, du moins à la première vision..."

    Tout à fait d'accord. D'ailleurs, comme à ton habitude, tu mas donné envie de le revoir!

    mercredi, 21 janvier, 2009  
    Anonymous Anonyme said...

    Salut Vincent,
    j'ai mis le temps mais j'ai enfin fini par déménager mes liens.
    Par ailleurs, très intéressante ta lecture de "Mulholland Drive", un film qui ne cesse de me fasciner à chaque revisionnage.
    Bravo et bonne continuation à toi ;o)

    dimanche, 01 février, 2009  
    Blogger Vincent said...

    @Zoun et @Twain81 (le rédacteur du Blog "La Lanterne", lien à droite) : Merci à vous deux, bien content de voir que vous aimez ce film complètement barré, je n'en attendais pas moins, d'ailleurs...
    Il ne me reste plus maintenant qu'à retenter "Inland Empire" (dur, dur)...

    dimanche, 01 février, 2009  
    Anonymous coming soonn said...

    voila l'article qui me fait dire que trop en dire tue le film. Après c'est de ma faute mais j'ai lu il y a plusieurs mois cet artcile et j'ai vu ce matin le film sans aucune découverte puisque j'avais lu cet article.
    Cependant car oui il y a un cependant j'ai une interprétation qui n'est pas forcement la même que toi: je dois revoir le film mais moi j'ai perçu le film totalement différemment. Même si ton interprétation n'est pas dénuée de sens.

    Dieu merci je résiste pour l'instant à la lecture et la vision des image de la mort aux trousses que tu as publié plus dernièrement!

    mercredi, 03 février, 2010  
    Blogger Vincent said...

    Dans l'ensemble, je suis plutôt assez d'accord avec toi (c'est d'ailleurs pour ça que désormais, j'annonce dès le début d'un article si celui-ci va - ou non - se révéler un "spoiler")...
    Ce que je ne pourrai sûrement jamais faire, par contre, c'est voir des films le matin (où comme de nombreux musiciens, je préfère dormir, lol !), surtout des films nocturnes complètement allumés comme celui-ci, qu'il a fallu que je vois 4-5 fois avant de commencer à m'y repérer... Ceci dit, il y a quelqu'un qui a fait un encore plus énorme "spoiler" que chez moi, en analysant le film "plan par plan", c'est Mulholland Drive Fan Page, et c'est extrêmement passionnant (cela a d'ailleurs dû lui prendre un temps fou) !

    mercredi, 03 février, 2010  
    Anonymous Jean-Paul Desverchère said...

    Des instants rares, délectés jusqu'à l’extrême, dans une fourmilière d’images improbables, chères à un metteur en scène complètement décalé d’une production traquant le billet vert, dans une profusion de clichés à la mode, que l’on ne peut à peine distinguer tant leurs vitesses de passages est inconsistante et rapide.
    Ici tout est long, mesuré, scruté de manière intensive.
    La caméra devient l’œil de personnages découvrant épouvantés ou émerveillés des lieux communs ou métaphysiques.
    Ce travail d’expert tisse, dans une trame que l’on peut suivre sans se répandre, tout un climat psychique halluciné, fabriquant des cobayes fragiles, pervers complètement dégénérés, victimes de leurs sens et de leurs dérives.
    Certaines scènes sont pénibles, surtout pour ceux qui les ont tournées, mais ces sacrifices sont essentiels, elles portent la pierre angulaire d’une œuvre forte, digne de hanter nos mémoires pendant très longtemps par leurs dégénérescences.
    Des images d’une beauté machiavélique, donnant naissance à un nouveau genre humain extrême, hallucinatoire, perverti dans une débandade de comportements assujettis aux plaisirs et à la destruction.
    Un être humain en perdition, azimuté par le crime, la luxure, la trahison, la folie dans un monde devenu un gigantesque délire visuel, menant nos devoirs au bord du gouffre.
    Aux portes du chef d’œuvre, Mulholland Drive perce l’abcès d’une jouissance trop retenue par nos contraintes et nos pudeurs, en déversant une surabondance jubilatoire, que nos interdits nous empêchent de vivre.

    mardi, 16 janvier, 2024  

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