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  • mercredi, juin 01, 2016

    EYES WIDE SHUT (STANLEY KUBRICK)

    Autrement dit, Les Yeux grand fermés...
    Hum, je ne ferai pas de spoiler... Non seulement parce que je ne vais pas raconter l'intégrale de ce film géantissime (l'ultime de Stanley Kubrick, daté de 1999), ce qui nécessiterait une centaine de photos et un texte gigantesque, mais surtout me contenter pour l'instant d'en faire l'analyse de quelques points fondamentaux concernant ce fameux "rêve intégral" - ce qui n'est pas un spoiler, puisque ceci sera très franchement révélé dans la dernière scène du film, comme vous le prouveront les ultimes photos mises à la fin de cet article, de même qu'un certain nombre de scènes en réalité filmées dans des miroirs, tout comme dans Shining, du reste :
    Tout ce que l'on voit dans des miroirs semble réel, mais ne l'est pas forcément... De même que ce qui apparaît sur certains tableaux, comme par exemple celui-ci (magnifique, dû à Christiane Kubrick, la femme du réalisateur) devant lequel passe Tom Cruise lors de l'une des premières scènes du film, durant la gigantesque soirée, et qui semble déjà annoncer à l'avance ce qu'il va découvrir en théorie réellement :
    Chose dont j'ai le plus envie de parler : l'aspect formel très étonnant de ce film (dont l'auteur est un fan absolu de musique classique), et qui semble une combinaison entre l'ancienne forme rondo (ABACADA) et la plus récente forme rétrograde (ABCDEFEDCBA)... Le début étant plutôt basé sur cette dernière forme, avec les scènes suivantes :
    A : La grande fête luxueuse
    B : Le couple dans leur appartement
    C : La rencontre de la prostituée
    D : Le concert de Jazz
    E : La boutique de vêtements
    F : La scène centrale du château
    Cette scène étant, comme beaucoup d'entre vous le savent, l'une des plus longues et des plus monstrueuses du film, où même sans miroir, tout le monde apparaît masqué dans ce sublime château (étant en réalité celui d'un Maharajah exilé en Angleterre) :
    Une scène relativement terrifiante (sans même parler de la musique très flippante de Györgi Ligeti) :
    Là encore, lorsque Tom cruise rentre chez lui (lors d'une scène que je baptiserai B2), le tableau représente mine de rien ce fameux château qu'il ignorait totalement le jour précédent, meilleure preuve qu'il s'agit d'un rêve :
    D'une façon très étrange, il y eut un jour l'interview de Martin Scorsese au sujet de ce film (l'un des très rares cinéastes à demeurer à New York plutôt qu'à Hollywood), qui disait avec son habituelle rapidité sicilienne de langage : "Mais oui, vous connaissez New York, il n'y a aucuns de ces magasins ni de ces bars, cela se voit tout de suite que c'est un rêve, m'enfin" !
    Mais il y en a également une autre énorme preuve... Notamment le fait que quel que soit l'endroit où se trouve Tom Cruise, le sapin est toujours le même, avec la même décoration, ce qui en théorie ne peut jamais réellement se produire (six photos des scènes A, B1, C, D & E) :
    Y compris dans deux scènes extrêmement courtes, la première ayant lieu dans le propre cabinet du docteur, et la seconde dans l'hôpital où il se rend afin de découvrir dans la morgue l'une des femmes qu'il croit connaître (où l'on entend la très étrange et très morbide pièce de Franz Liszt, Nuages Gris) :
    Juste histoire de terminer ma vague analyse de ce film, voici le moment de reparler de la forme globale, à mi chemin entre la forme rondo et la forme rétrograde, de sorte que l'on peut ainsi classifier les scènes : A, B1, C, D, E, F (le château central), puis B2, E, B3, C, H (la morgue), A, B4 & B5...
    B s'avère ainsi le thème principal du rondo, et il s'agit de celui traité de la façon la plus maniaque possible par le perfectionniste Stanley Kubrick (qui a tout de même passé plus de deux ans à tourner ce film très intimiste, ce qu'un réalisateur français aurait fait en deux mois)... Meilleure preuve en partant tout d'abord de B1, premier plan orange avec le fond de ciel bleu :
    B2, premier plan bleu avec le fond orange :
    B4, premier et dernier plan en bleu :
    B5, premier et dernier plan en orange, avec en prime tout un dialogue qui révèle de façon très claire le thème fondamental du film, dont sans doute il ne s'agit que de la seule et unique scène "réelle" (et certes, d'une assez faible gaîté, il faut bien le dire) :
    Bref, un film totalement hallucinant, en résumé... Non seulement lors de la toute première vision, mais vu de mon côté, plus je le regarde, et plus je le trouve incroyable et géantissime ! Sans même parler de l'incontournable mysticisme des nombres de la part du réalisateur, identique à celui du fameux Johann Sebastian Bach...
    En l'occurrence ici celui du chiffre deux (bien évidemment basé sur le couple) ! De sorte qu'hormis l'alternance de ces deux couleurs bleu & orange dont je viens tout juste de parler, le film s'ouvre comme par hasard sur la Valse N°2 de Chostakovitch, et trouve bien sûr son point culminant très flippant avec la Musica Ricercata N°2 de Ligeti, un morceau lui-même très curieusement juste fondé sur deux notes (mi# & fa#), avec soudain l'arrivée inattendue et très brutale d'une troisième et dernière note (sol), qui coïncide à la seconde près avec le point crucial de la pire scène du film, celle du château...
    Que dire de plus ? Sinon qu'au niveau de l'analyse, ce film est quasiment digne d'une fugue de Johann Sebastian Bach : on peut le revoir 5 fois, 10 fois, 50 fois, et l'on découvrira toujours quelque chose de nouveau, un code illisible la toute première fois, et en résumé une pluie de symboles absolument énorme !

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