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  • jeudi, juin 20, 2024

    LOVE AND OTHER DRUGS (EDWARD ZWICK)

    Avez vous déjà vu et aimé ce film, qui en 2010 marquait la première intrusion d'Edward Zwick dans le domaine comique, sept ans après son chef-d'œuvre que fut The Last Samurai ? Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais à mes yeux, il s'agit d'un Opus excellent, non seulement très drôle, mais en outre bien réaliste, puisqu'il traite sans hésiter de la maladie de Parkinson, la seconde après celle d'Alzheimer à frapper les êtres humains vieillissants, et beaucoup plus rarement les jeunes personnes.

    Cela pourrait être complètement raté ou vulgaire, mais ce n'est pas du tout le cas, entre autre grâce à la présence essentielle de Jamie Randall (Jake Gyllenhaal, le principal acteur du film)... Au début, il joue le rôle d'un simple vendeur de hi-fi, très expressif vis-à-vis des jeunes filles, mais fini par se faire virer par le patron dont il a couché avec la femme, et se retrouve comme par hasard comme délégué médical pour Pfizer - marque qui existe vraiment, avec laquelle Jamie Reidy, l'auteur du livre qui a inspiré Edward Zwick, a longuement collaboré :

    Au fond, peu importe... Jamie Randall ne vend plus la même chose, mais toujours aussi efficacement, d'autant plus que la marque pharmaceutique ne se gène pas du tout pour mettre en valeur ses médicaments anti-Parkinson - l'ensemble se déroulant dans la ville de Pittsburgh, véritable centre médical des Etats-Unis :
    Il se retrouve accompagné de son petit frère Bruce Jackson (Oliver Platt)... Lequel est évidemment moins beau, déjà marié, légèrement grossissant, mais absolument expert en matière de vente :
    Il ne lui reste plus qu'à rencontrer dans un hôpital Maggie Murdock (Anne Hathaway), pour que tout le film se base sur ce fabuleux couple... Elle aussi est absolument extraordinaire dans ce rôle complexe, et  avait déjà joué avec Jake Gyllenhaal cinq ans auparavant, dans Brokeback Mountain de Ang Lee :
    Evidemment, tout ne se passe pas très bien entre tous les deux, au début, où elle s'offre le privilège de le frapper :
    Mais ceci s'améliore très vite dans un bar :
    Où elle finit, en dépit de ses propos, par se l'offrir vite fait bien fait :
    En fait, toute la première partie du film se base sur cette attirance incontrôlable pour le sexe, qu'ils connaissent tous les deux à la perfection - bien qu'ils le vivent de façon fort différente, on comprendra mieux pourquoi par la suite. C'est la grande particularité de cette relation, qui au lieu de commencer par des sentiments et finir par l'acte sexuel, suit exactement le sens inverse :
    Certes, il y a aussi des fois où ça ne marche pas...  Mais ceci n'est pas dû à elle, comme elle se permet de le lui faire remarquer, non sans une certaine ironie :
    Du coup, Jamie Randall décide de la suivre au Canada, où il l'a vu effectuer son travail d'accompagnatrice de personnes âgées, et lui propose avec sincérité une relation plus sérieuse... Mais celle-ci y pose tout de suite ses limites, en refusant d'emblée d'habiter le même appartement, ou de se présenter des amis :
    Petit à petit, il commence à deviner sa maladie, sans bien savoir qu'il s'agit de Parkinson... Mais comme par hasard, son frère lui présente peu de temps après un médicament extrêmement efficace pour l'érection, le Viagra - évidemment fabriqué par Pfizer :
    Cela ne les concerne pas, vu qu'ils n'ont pratiquement aucun problème de ce côté... Bien au contraire, ils se montrent de plus en plus près l'un de l'autre, et vont même jusqu'à se filmer :
    Résultat ? Ils finissent par se dire ce qu'ils ressentent vraiment l'un pour l'autre... Mais ceci a une influence étrange sur Maggie Murdock, qui ne sait plus vraiment où elle en est :
    Du coup, Jamie Randall lui dit ce qu'il pense vraiment, qu'elle devrait l'accompagner à Chicago pour assister à une conférence sur la maladie de Parkinson :
    Comme par hasard, il tombe sur un homme marié avec une femme atteinte au dernier degré de cette maladie, qui lui déconseille fortement de se lancer dans une telle aventure... Mais cela ne déconcerte pas du tout Maggie Murdock, qui ne l'a pas entendu, et a au contraire capté toutes les opinions positives :
    Enthousiastes dans un premier temps, ils entreprennent donc une balade immense à travers tous les hôpitaux du coin :
    Mais celle-ci se révèle rapidement trop longue, trop variée, trop difficile à mettre en place... De sorte que Maggie Murdock préfère renoncer à tout pendant qu'il en est encore temps - y compris à sa cohabitation avec Jamie Randall :
    Complètement déprimé par cette rupture incompréhensible, il accepte finalement - bien qu'il n'en ait pas franchement envie - d'accompagner son frère à une soirée nettement orientée sexe à Chicago :
    Tout le monde est en pyjama ou complètement nu, et s'invite visiblement au sexe sans le moindre complexe :
    Comme il en donnait l'impression, Jamie Randall s'est visiblement ennuyé au plus haut point... Mais son frère pas du tout, qui n'arrête pas de le complimenter dans la voiture vis-à-vis de ce qu'il a éprouvé pour la première fois de sa vie :
    Puis comme par hasard, Jamie Randall revoit Maggie Murdock dans un café, en apparence avec un nouveau mec - dont elle ne se rappelle même pas le prénom :
    Ils se quittent en bons termes... Mais cela n'empêche pas Jamie Randall de se livrer, une fois rentré chez lui, à son activité préférée - regarder les cassettes de Maggie Murdock :
    En fait, il n'en peut plus... Il prend sa voiture, et poursuit le car de Maggie Murdock jusqu'au Canada, en attendant qu'il s'arrête enfin :
    Et ils se disent enfin la vérité :
    Mais c'est bien plus intéressant à découvrir sur ce petit clip, qui nous dévoile leurs attitudes très embarrassées - accompagnés en outre par la fort belle musique de James Newton Howard :
    Vous n'aimez pas cette fin ? J'en doute fort :

    Si jamais c'est le cas, regardez le trailer, et vous allez tout de suite changer d'avis :

    Certes, je ne pense pas que cet Opus soit le plus grand de Edward Zwick, qui a davantage l'habitude de se consacrer à des sujets bien plus sensibles et véridiques, comme il l'a fait avec The Last Samourai (2003), Blood Diamond (2006) ou Les Insurgés (2008). Néanmoins, le thème est plutôt original, rarement traité à l'écran, en grande partie authentique, et surtout très drôle - ce qui n'est pas rien concernant ce genre de film, souvent déplorable dans 90% des cas...

    En tous cas, Jake Gyllenhaal et Anne Hathaway remportèrent tous deux en 2011 le prix Golden Globe de meilleur acteur (et actrice) dans un film musical ou une comédie, ce qui montrent suffisamment la présence qu'ils occupent dans ce chef-d'œuvre. Personnellement, j'en suis très content !

    Autres films du même réalisateur : The Last SamuraiBlood Diamond

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    samedi, juin 15, 2024

    RAN (AKIRA KUROSAWA)

    Pour une fois, je publie cet article pour l'anniversaire de Chah, une amie résidant à Grasse, servant de professeur à de nombreux élèves, et en outre ayant le temps de consulter mon site, y laissant souvent des commentaires éloquents...

    Je suis donc fort content de lui adresser cet article précisément le 15 juin, car il concerne l'un des plus grands films de cette planète, Ran, qui je l'espère lui plaira énormément. Bon anniversaire, Chah !

    Tourné juste après Kagemusha, qui lui valu la Palme d'Or de Cannes en 1980, Ran (qu'on peut traduire en français par Chaos) marque enfin le retour d'Akira Kurosawa en 1985 parmi les plus grands cinéastes du monde, cette fois-ci soutenu financièrement par les deux français Serge Silberman et Daniel Toscan du Plantier.

    Avec un budget franco-japonais de 12 millions de dollars, c'était à l'époque le film le plus coûteux jamais produit par un réalisateur de ce pays, et surtout l'un de ceux travaillé dans le domaine du storyboard en peinture depuis 1976 par Akira Kurosawa lui-même - ce qui a été publié plus tard sous forme de livre.

    Au départ, cet Opus s'inspirait surtout de l'histoire bien réelle du daimyo Motonari Môri (1497-1571), dont les trois fils furet encouragés à travailler ensemble pour la prospérité du clan. Mais cela ressemblait de plus en plus à la pièce Le Roi Lear écrite autour de 1605 par William Shakespeare, de sorte que Kurosawa finit par indirectement l'intégrer au film - bien que sa façon de traiter du chaos engendré par les trois hommes représente également une assez virulente critique de l'état japonais, qui l'a fait beaucoup souffrir les années précédentes.

    A la place de Motonari Môri, nous rencontrons donc le daimyo Hidetora Ichimonji (Tatsuya Nakadai), qui s'expose dès le début avec ses trois fils, dont le plus âgé se nomme Taro (Akira Terao)... On a ici l'ordre des couleurs, allant du jaune pour l'aîné au bleu du frère cadet, ce qui contribuera beaucoup à l'ordre du film, chacune des armées étant vêtu de la même teinte :

    Aussitôt suivi par Jiro (Jinpachi Nezu) et enfin le plus jeune Saburo (Daisuke Ryû)... Mais celui-ci se révolte naturellement contre le test des trois flèches, théoriquement impossibles à briser ensemble, et est aussitôt banni par Hidetora :
    Heureux pour Saburo qu'il se retrouve appuyé par Fujimaki (Hitoshi Ueki), daimyo théoriquement opposé, qui a toutes les chances de devenir un jour son beau-père :
    Il reste à Hidetora à rencontrer l'épouse de Taro, la dame Kaede (Mieko Harada), bien plus manipulatrice qu'elle ne le paraît au premier abord :
    En fait, la véritable intention de Kaede  - liée à l'extermination de toute sa famille autrefois par Hidetora - est d'éliminer ce dernier en lui faisant signer avec son sang un simple papier, qui assure désormais à Taro de prendre la totale direction du clan :
    Furieux, Hidetora se rend alors au second château, celui de Jiro, où il commence à discuter avec Sue (Yoshiko Miyazaki), l'épouse de ce dernier - dont il a aussi massacré toute la famille, mais qui s'est tournée vers le bouddhisme et lui a pardonné, contrairement à Kaede :
    Mais Jiro est fort peu sympathique, et expulse Hidetora du second château, sans même lui donner d'explication :
    Entouré de son fidèle bouffon Kyoami (Shinnosuke Ikehata), Hidetora se retrouve en train d'errer dans les plaines, à la recherche de nourriture :
    Lorsqu'il parvient enfin au troisième château, celui de Saburo, il constate que ce dernier n'est plus là, et s'apprête à vivre l'une des attaques les plus terribles de Taro :
    En fait, Saburo s'est rendu chez Fujimaki, son futur beau-père, laissant dans le château Hidetora à la merci des deux armées qui se sont engagées, celle de Taro et celle de Jiro :
    Il assiste alors impuissant à la dégradation du château par les troupes concernées, qui se conclut avec le massacre de plusieurs de ses gardes du corps, le suicide de leurs concubines, et au final par l'incendie volontaire du château :
    Finalement, Taro - le plus âgé et le plus puissant des trois héritiers - est abattu par un arquebusier embusqué dans l'une des tours : 
    A partir de là, la scène se déroule dans le plus grand silence, montrant non seulement les trajectoires insensées de différentes flèches, mais surtout la descente du château en flammes par Hidetora - ce qui est en quelque sorte pour Kurosawa la façon de nous montrer en quoi l'être humain peut facilement se révéler fou ou insensé :
    Ne sachant plus où aller, Hidetora marche quelque temps sur les pentes herbeuses de la montagne, puis se rend accompagné de son bouffon Kyoami dans la hutte de Tsurumaru (Mansai Nomura), frère de dame Sue :
    Sue est également présente, mais ce sont les dires de Tsurumaru qui toucheront le plus profondément Hidetora, en lui parlant non seulement de la destruction totale de sa famille, mais aussi du fait qu'il lui ait crevé les yeux :
    Tout comme sa sœur, Tsurumaru s'en désintéresse, ayant au passage découvert la flûte comme moyen d'expression - superbe musique de Tôru Takemitsu, qui joue ici avec les traditions japonaises et anciennes d'une façon très efficace :
    C'est alors que Kaede, l'épouse de Taro provisoirement en deuil, tente de séduire le désormais daimyo Jiro, et fait preuve immédiatement de son caractère bien tranché : 
    Une fois tout ceci réussi, elle en vient au point essentiel pour elle : comment se débarrasser de Sue, la femme officielle de Jiro ? Et elle n'a bien sûr qu'une seule chose en tête :
    Pendant tout ce temps, Hidetora bascule vers la folie, seulement accompagné par son bouffon Kyoami, qui s'amuse comme il peut avec sa tête :
    Façon plus ou moins ironique de conduire le spectateur à voir ce que recherche effectivement Kaede, la tête de Sue... Et l'attitude faussement surprise du maître d'armes de Jiro, Kurogane (Hisashi Igawa), qui a l'air très étonné du changement du crâne de Sue en simple pierre - bien qu'il cite, comme par plaisir, des cas similaires déjà réputés :
    Du coup, Kyoami dit des choses bien plus ironiques à Hidetora, qui nous laissent de plus en plus penser qu'il est devenu fou :
    C'est alors que se prépare en toute apparence le piège de Jiro envers Saburo - qui en réalité est puissamment élaboré par Kaede :
    En fait, il s'agit tout simplement de persuader Saburo que Jiro lui donne l'autorisation d'aller chercher leur père Hidetora - ce qui dans un premier temps a l'air de bien se passer :
    Mais la réalité est toute autre, et se trahit par l'intention de Jiro de tuer tout à la fois Saburo et Hidetora - ce qui le laissera le seul daimyo :
    Saburo se pointe alors à l'extérieur, tentant de montrer sa grande fidélité au désespéré Hidetora :
    Mais c'est au même moment que Jiro décide d'envoyer ses hommes, dont des centaines vont être tués par les guerriers de Saburo, habilement dissimulés au sein de la forêt...
    Dans cette scène, se révèle encore plus nettement que dans l'attaque du second château l'opposition entre les couleurs rouge et bleu - une grande spécialité d'Akira Kurosawa... La première est liée à la violence, à la passion et au sang, la seconde davantage proche de l'humanité, avec son côté plus calme et serein :
    Si vous souhaitez assister à cette dernière bataille, allez-y :
    En apparence, cela a l'air de bien finir, avec la victoire de Saburo, confronté à Hidetora qui semble avoir retrouvé ses esprits : 
    Mais ce n'est bien sûr qu'une illusion... Saburo est tué à son tour par les arquebusiers de Jiro, un corps sur lequel tombe aussitôt celui d'Hidetora, qui mourra dans les quelques minutes à suivre :
    Jiro, qui se pense de nouveau le seul daimyo, n'attend que deux choses avec une grande impatience - les crânes respectifs de Saburo et Hidetora :
    Est-ce là le point commun avec la précédente livraison de la pierre à dame Kaede ? En tous cas, celle-ci dévoile enfin sa véritable intention dès le départ, récupérer le château de ses parents, et diviser les fils de Hidetora au point qui l'arrange le plus...
    Irrités par cette révélation et la haine inattendue qu'elle dévoile, Jiro et son maître d'armes Kirogane se jettent sur elle, et sans aucune compassion la décapitent :
    Il ne reste plus qu'une chose : la débâcle de l'armée de Jiro, qui est certes suggérée, mais pas montrée effectivement :
    Comme ultime plan, nous n'avons que celui-ci : Tsurumaru errant sur les ruines du château de son père... Et laissant tomber dans le vide - comme par hasard - le dessin qu'il a de Bouddha protecteur :

    Que dire d'autre sur cet Opus ? Pour une fois, je ne vais pas vous diriger vers Wikipédia, mais plutôt sur cet article passionnant et comportant de nombreuse photos éloquentes, dû à Ronny Chester : RAN... Il raconte les points que je cite, mais d'une façon bien meilleure, et peut-être plus adaptée à quiconque a déjà vu le film plusieurs fois.

    En tous cas, je trouve là l'un des meilleurs cinéaste du monde, Akira Kurosawa, face auquel je n'ose placer qu'un seul et unique maître : Stanley Kubrick (1928-1999)... Je ne le regarde pas ce film aussi souvent qu'il le mérite, mais à chaque fois, cela représente une expérience unique et considérable !

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